08: Maizières à Gy

La dernière étape, avant la séparation des parcours pour Vézelay ou le Puy-en-Velay

DIDIER HEUMANN, ANDREAS PAPASAVVAS

 

 

Nous avons divisé l’itinéraire en plusieurs sections, pour faciliter la visibilité. Pour chaque tronçon, les cartes donnent l’itinéraire, les pentes trouvées sur l’itinéraire et l’état du parcours. Les itinéraires ont été conçus sur la plateforme “Wikilocs”. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’avoir des cartes détaillées dans votre poche ou votre sac. Si vous avez un téléphone mobile ou une tablette, vous pouvez facilement suivre l’itinéraire en direct.

Pour ce parcours, voici le lien:

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/de-maizieres-a-gy-par-le-chemin-de-compostelle-228023590

Ce n’est évidemment pas le cas pour tous les pèlerins d’être à l’aise avec la lecture des GPS et des cheminements sur un portable, et il y a encore de nombreux endroits sans connexion Internet. De ce fait, vous pouvez trouver sur Amazon un livre qui traite de ce parcours.

 

 

 

 

Si vous ne voulez que consulter les logements de l’étape, allez directement au bas de la page.

Cette région de Haute-Saône, aux confins de la Bourgogne et de la Franche-Comté, est centrée autour du bourg de Gy, son ancienne capitale. Elle s’étend sur une quinzaine de communes nichées dans un paysage de collines douces et de vallons verdoyants. Les paysages y sont variés : prairies d’élevage, forêts de chênes et de hêtres, coteaux autrefois couverts de vignes. Le Val de Gy fut longtemps une terre viticole réputée. Du Moyen Âge jusqu’au XIXe siècle, les coteaux de Gy et de Bucey-lès-Gy produisaient un vin exporté bien au-delà de la région, jusqu’à Paris et même à l’étranger. Après le phylloxéra et les guerres, les vignes disparurent presque entièrement, remplacées par les cultures et l’élevage. Peu de races subsistent de ces marques de ce passé, si ce n’est dans l’architecture des maisons vigneronnes. Sur le plan historique, le Val de Gy fut marqué par l’influence des archevêques de Besançon, qui y installèrent leur résidence d’été. Le vaste château de Gy, résidence fortifiée qui domine le bourg, rappelle cette période de puissance et d’éclat. Dans les villages alentour, les églises rurales, les lavoirs et les fontaines en pierre contribuent à un patrimoine discret mais intéressant. C’est une petite région discrète, loin des grands axes, où l’on peut ressentir la profondeur du temps et la simplicité vivante d’une campagne française authentique.

C’est une étape charnière du chemin de Compostelle en Franche-Comté, car Gy marque une bifurcation vers deux grandes voies : Vézelay ou Le Puy-en-Velay.

Comment les pèlerins planifient-ils leur parcours ? Certains s’imaginent qu’il suffit de suivre le fléchage. Mais vous constaterez à vos dépens que le fléchage est souvent déficient. D’autres utilisent les guides à disposition sur Internet, eux aussi souvent trop élémentaires. D’autres préfèrent le GPS, à condition d’avoir importé sur le téléphone les cartes de Compostelle de la région. En utilisant cette manière d’opérer, si vous êtes un expert de l’utilisation du GPS, vous ne vous perdrez pas, même si parfois le parcours proposé n’est pas exactement le même que celui proposé par les coquilles. Mais, vous arriverez sauf à la fin de l’étape. En la matière, le site qu’on dira officiel est le parcours européen des Chemins de Compostelle (https://camino-europe.eu/). Dans l’étape du jour, la carte est correcte, mais ce n’est pas toujours le cas. Avec un GPS, il est encore plus sûr d’utiliser les cartes Wikilocs que nous mettons à disposition, qui décrivent le parcours actuel fléché. Mais tous les pèlerins ne sont pas des experts de ce type de marche, qui pour eux, défigurent l’esprit du chemin. Alors, vous pouvez vous contenter de nous suivre et de nous lire. Chaque embranchement difficile à déchiffrer du parcours, a été signalé, pour vous éviter de vous perdre.

Difficulté du parcours : Les dénivelés de l’étape du jour (+505 mètres/498 mètres) sont assez élevés pour une étape en France Comté. Elle débute par une forte montée au-dessus de Maizières, suivie de montagnes russes constantes, souvent peu légères. Plus loin, la montée vers la Grotte de la Baume Noire ne laissera pas le pèlerin indifférent. Puis, le parcours se stabilise jusqu’à la fin de l’étape en montagnes russes, sans grande difficulté.

État du parcours : Comme souvent en Franche Comté, les parcours favorisent les chemins, qui sont souvent, hélas, assez caillouteux :

  • Goudron : 7.4 km
  • Chemins : 16.0 km

Parfois, pour des raisons de logistique ou de possibilités de logement, ces étapes mélangent des parcours opérés des jours différents, ayant passé plusieurs fois sur sur ces parcours. Dès lors, les ciels, la pluie, ou les saisons peuvent varier. Mais, généralement ce n’est pas le cas, et en fait cela ne change rien à la description du parcours.

Il est très difficile de spécifier avec certitude les pentes des itinéraires, quel que soit le système que vous utilisez.

Pour les “vrais dénivelés”, relisez la notice sur le kilométrage sur la page d’accueil.

Voici un exemple de ce que vous trouverez. Il suffit de prendre en compte la couleur pour comprendre ce qu’elle signifie. Les couleurs claires (bleu et vert) indiquent des pentes modestes de moins de 10%. Les couleurs vives (rouge et brun foncé) présentent des pentes abruptes, le brun dépassant 15%. Les pentes les plus sévères, supérieures à 20-25%, très rarement plus, sont marquées de noir.

Section 1 : Entre Maizières et Recologne-lès-Rioz

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours vallonné, avec parfois des pentes prononcées, en montée comme en descente.

Le parcours du jour quitte Maizières au carrefour où coule la gracieuse rivière de la Romaine, dont les eaux murmurent doucement entre les berges.  
Il convient ici de ne pas manquer le départ, au risque d’errer toute la journée, car le parcours n’est nullement indiqué. Nous allons donc vous guider. Il emprunte d’abord la rue d’Éguilley, puis oblique à angle droit vers la rue du Pays Neuf. Plus haut, une bifurcation vous mène à la rue du Mont. Vous voilà rassuré : la coquille réapparaît.  
La rue du Mont est une petite route qui s’élève sèchement à travers les prés, frôlant la lisière du bois.  
Le même jeu se poursuit sur près d’un kilomètre : de rares véhicules, le plus souvent un tracteur, troublent parfois la quiétude. Au fond, ce n’est qu’une impasse.  
Plus haut, la route étroite traverse un petit bosquet ombragé.  

 

Elle se hisse ensuite paresseusement jusqu’à une clairière au sommet de la butte. Là, une coquille vous invite à descendre vers les prés qui s’étendent en contrebas.  
Le paysage s’ouvre alors sur de larges ondulations. Le chemin s’engage dans l’herbe, longeant en douce descente la Combe aux Merles, bordée à gauche d’une haie touffue, au cœur d’une nature encore sauvage.  
Plus bas, l’itinéraire quitte les prés pour s’enfoncer dans un sous-bois sombre et dense.  
Mais il n’y demeure guère : bientôt, le sentier foule de nouveau l’herbe haute et gagne la steppe drue du Creux des Vernes.  
Au bas de la pente, il rejoint une petite route agricole traversant les champs : c’est la rue du Pont Neuf, croisée déjà à la sortie de Maizières.   
Le parcours va suivre longtemps cette petite route qui s’étire au loin dans une campagne intacte. Il traverse alors la région dite du Creux des Vernes : section un peu monotone, presque austère, entre bosquets clairsemés et prairies.  
Lorsque l’on dit « verne », on imagine naturellement un milieu humide. Cet arbre, appelé aussi aulne, affectionne marais et bords de rivières ; il peut atteindre belle hauteur et fournit souvent un bois de chauffage apprécié. Et pourtant, ici l’humidité ne semble guère présente, à moins que la plaine n’ait été assainie autrefois. Les tas de bois au bord de la route sont d’ailleurs plutôt du chêne.  
La route est longue, souvent rectiligne, dans ce Creux des Vernes, et l’œil peine à se fixer sur quelque chose de véritablement captivant.  
L’espace se partage entre élevage et cultures modestes.  
Plus loin, la terre battue remplace le goudron fatigué, sans que le paysage n’en soit vraiment transformé. C’est toujours la même fadeur monotone.  
On pourrait se sentir perdu, seul au milieu de la nature. Mais une petite coquille plantée sur un poteau de bois rappelle avec bienveillance que vous marchez toujours sur la bonne voie.  
Le parcours change alors de visage. Le large chemin s’achève en cul-de-sac et délaisse la vaste plaine dénudée pour l’herbe haute qui frange la forêt.  
Un ample chemin s’élève dans l’herbe des prés et des champs, le long d’une haie où abondent frênes et chênes. La coquille se montre ici fidèle compagne. Aujourd’hui, les tournesols dorent le paysage ; un autre jour, ce sera peut-être une autre culture, tant les paysans alternent leurs semences.  
Plus haut, le chemin retourne dans la forêt.  
Un très large chemin empierré s’élance alors, en pente soutenue, à l’assaut de la colline, dans le Bois du Charmant. Sur cette rude montée, vous avancerez à l’ombre généreuse des frênes, sous la protection des chênes, au milieu des hêtres, des charmes et des érables plus discrets.  
Au sommet de la butte, le chemin rejoint la route départementale D192, où les véhicules filent parfois au-delà de la mesure. Là, une coquille bien orientée vous invite à suivre la route, vers la gauche.  

Section 2 : Dans les grandes forêts

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours vallonné, avec parfois des pentes prononcées, en montée comme en descente.

Le parcours suit alors la route rectiligne qui s’étire en direction de Recologne-lès-Rioz, comme un long trait posé sur la campagne.  

Mais il n’atteint pas le village, blotti au pied de la colline, près de son étang immobile. Il faut surtout ne pas manquer l’intersection, cette discrète petite route qui s’échappe vers la droite.

Au pied d’un chêne, gardien silencieux du carrefour, le parcours oblique à droite et s’élance sur une étroite route campagnarde.  
La petite route glisse d’abord à plat, puis se transforme en chemin de terre. Là, la flèche de la coquille vous invite à tourner à droite. Dieu merci qu’elle soit là, car, fidèle à sa réputation, la coquille seule serait mal orientée.  
Après une courte ligne droite à travers les champs, la route de terre battue infléchit sa course, repart vers la gauche, conformément à la direction que suggère la coquille.  
La piste file à plat entre prairies et cultures de céréales. Devant vous, une ligne droite s’allonge, paraît infinie. Et, en effet, elle l’est presque.  
Au terme de cette longue ligne, elle se cabre et grimpe en pente soutenue vers la masse sombre de la forêt.  
Au sommet de la montée, le chemin rejoint une cabane de chasseurs. La porte est ouverte. À l’intérieur, un sanglier empaillé semble accueillir le voyageur de son regard de verre. On nous l’a dit : ici, on chasse surtout le gros gibier. Sangliers et cervidés règnent sur ces bois.  

À partir de la cabane, un large chemin de terre descend doucement dans le grand Bois de Chanénot. Les charmes et les hêtres y reviennent en abondance, serrés comme une armée immobile, mêlés aux chênes solides, aux érables parfois rabougris, plus rarement à de hautes futaies.  
Plus bas, il quitte l’ombre du bois et s’aventure sur des pelouses sèches, dans une vaste clairière cerclée de bosquets épars, où l’on devine la vie secrète du gibier sauvage.  
Le pseudo-chemin bondit alors de pelouse en pelouse dans l’herbe haute. L’endroit est si sauvage que vous vous demanderez si vous cheminez encore sur la bonne voie, car aucune coquille ne vient vous rassurer.  
Plus bas, au bout de la clairière, un sentier se glisse de nouveau dans la forêt. Il musarde sous la voûte épaisse, parfois englué dans la boue, même lorsque le ciel demeure sec.  
Bientôt, vous retrouvez la coquille. Le cœur se détend : vous ne vous êtes pas égaré. Et, miracle, cette fois la coquille est parfaitement orientée. Comme quoi, les baliseurs gagneraient à posséder de bonnes coquilles !  D’autres symboles jalonnent aussi le chemin : sans doute des itinéraires de randonnée locaux, aux signes presque cabalistiques.
Par endroits, les feuillus montent vers le ciel, et charmes et hêtres rivalisent de hauteur avec les chênes souverains.   
Pour distinguer hêtres et charmes, il ne faut pas se fier aux troncs, mais regarder les feuilles : très dentelées chez le charme, beaucoup moins chez le hêtre. Voici les feuilles dentelées du charme et celles plus douces du hêtre.  
Plus bas, le chemin traverse une zone très marécageuse, où l’on risque de s’enliser. Heureusement, le passage est bref.   
Bientôt, le sentier quitte le bois et débouche dans une clairière où se blottit un nouveau refuge de chasse, appartenant au village voisin de Fretigney. Sincèrement, vous pousserez un soupir de soulagement en retrouvant ce signe de civilisation, après ce tumulte forestier.  

Devant la vaste place qui doit, en saison, accueillir une foule de chasseurs, vous retrouvez la coquille de Compostelle, qui indique la plaine en contrebas.  
Depuis le refuge, une large route de terre descend en pente marquée, entre campagne et lisière de forêt, au fond d’un vallon.  
La route dévale jusqu’à rejoindre la départementale D3, qui file au creux d’un vallon verdoyant.   
Ici, observez bien la coquille, encore mal placée mais dotée d’une flèche sans ambiguïté. Ne continuez surtout pas tout droit : vous vous perdriez à coup sûr. Il faut virer à gauche sur la D3. Mieux vaut avoir avec soi le petit guide des Amis de Compostelle, car la route qui grimpe au-dessus paraît engageante. Elle ne l’est pas pour vous.  
Deux cents mètres plus loin, la coquille vous invite à quitter la route pour pénétrer dans la forêt.  
Ne manquez surtout pas la bifurcation, car elle ne saute pas aux yeux. Aussitôt, un sentier attaque l’ascension de la colline, dans la forêt profonde du Bois de Vermot.  
Le sentier grimpe avec ardeur au-dessus de la route, en pente soutenue, sous la voûte sombre des feuillus. Les grands chênes y dominent, éclaboussant de leur hauteur les érables, les charmes et les hêtres plus ramassés.  
Le long du sentier poussent ronces, fougères, cornouillers et herbes folles. Par endroits affleurent des bancs rocheux, annonçant peut-être déjà la Grotte de la Baume Noire.  
Le sentier virevolte, grimpe sans répit sur près de cinq cents mètres depuis la route, parfois à près de vingt pour cent de pente…   

… jusqu’à atteindre un replat où il infléchit sa course et tourne vers la gauche. La coquille de Compostelle indique la voie. Ici, la forêt est privée. Mais qu’importe : en France, près de 90 % des forêts le sont. Sans l’accord des propriétaires, jamais le chemin de Compostelle n’aurait vu le jour.

Section 3 : Dans la forêt de Vermot

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours vallonné, mais rien de sérieux.

Le sentier s’engage ensuite à plat dans la forêt profonde, somptueuse cathédrale de feuillus où la lumière se filtre en nappes dorées. La nature sauvage y murmure et chante doucement, d’autant que l’effort s’efface presque tout à fait.  

Plus loin apparaît une bifurcation, gardée par un panneau usé par les pluies et les années, comme effacé à demi, qui prétend dessiner la région de la Grotte de la Baume Noire. De semblables cartes se retrouvent en plusieurs points du parcours. Pourtant, le mystère demeure entier : nul tracé fléché n’y conduit vraiment. La grotte semble réservée aux initiés et aux sangliers.

Vous cheminez en réalité dans le grand Bois du Vermot, dans une forêt privée mais accueillante, forêt généreuse qui offre son ombre fraîche sous les arbres géants. Ici, les coquilles et le balisage jaune et rouge se multiplient sur les troncs, de peur que vous ne vous perdiez dans ce dédale de sentiers. On rencontre même un cercle jaune, autre signe de passage. Ce balisage jaune et rouge annonce des chemins de Petite Randonnée, bien différents du rouge et blanc des Grands Chemins. Aucun GR ne traverse ces bois sauvages et secrets.  
Plus loin, le sentier étroit ondule davantage dans cette nature vierge, parfois presque excessive, s’élevant brièvement sur une pente plus sévère avant de retrouver son souffle.  
Ici, le fléchage devient omniprésent. On comprend pourquoi : il serait si facile de s’égarer dans ces futaies silencieuses. Certains randonneurs ne rêveront plus que de voir apparaître la sortie du bois comme une délivrance. Car ce sont près de six kilomètres à marcher dans cette forêt qui impressionne quand on est seul, avant de retrouver la vie à Gracheux.  
Plus loin encore, le sentier se resserre, serpente avec douceur dans une nature sauvage et un peu désordonnée, parmi les souches moussues et les buissons qui griffent les chevilles.  
Le balisage se renforce à nouveau, escortant ce chemin perdu au milieu des herbes folles et des fourrés.  
Puis, peu après, le sentier s’élargit soudain. Les grands feuillus reprennent de la hauteur et de la majesté de part et d’autre du chemin. Le registre change : le sentier se fait presque rectiligne et file longtemps à plat, sur plus d’un kilomètre, dans un décor somptueux, paisible et régulier comme une allée d’ancienne forêt seigneuriale.  
Beaucoup plus loin, le chemin s’autorise quelques fantaisies : de légères courbes, des frémissements de pente, comme s’il jouait avec le relief, avant de retrouver sa longue rectitude.  

Section 4 : D’un vallon à l’autre

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours très vallonné.

Puis, progressivement, le chemin amorce sa descente vers la plaine, se resserrant à nouveau en un sentier plus étroit, comme pour glisser plus discrètement entre les arbres.  
La pente devient alors plus rude dans le bois resserré, toujours aussi dense et mystérieux, où chaque tronc semble garder un secret.  
Encore quelques soubresauts sur les pentes boisées, le sentier bondissant d’une courbe à l’autre, et parfois, comme un clin d’œil rassurant, une coquille apparaît pour vous indiquer la voie…   
… et le chemin finit par sortir de la forêt, passant devant un abri rustique et une table de pique-nique offerte aux pèlerins. Ces refuges modestes, à peine équipés d’un banc, servent parfois de gîte improvisé pour les marcheurs sans ressources, qui y trouvent pour une nuit un toit de hasard et le murmure de la forêt comme berceuse.  
Le chemin rejoint alors la route, à l’entrée de Grachaux.  
La route ne fait qu’effleurer le village, perché un peu plus haut. Elle débouche sur un giratoire où se trouve même un arrêt de bus, événement presque remarquable dans cette campagne de France.  
La route descend ensuite en ligne droite en quittant le village, pour quelques centaines de mètres encore.  
Elle rejoint la départementale D5, qu’il faut traverser. Au bout, un panneau coiffé d’une fausse coquille, mais indiquant la bonne direction, désigne le chemin droit devant, vers la colline qui ferme l’horizon de l’autre côté du vallon.  
C’est la direction des Malbuissons. Le chemin s’engage dans un court sous-bois, gagne les prés lumineux, puis, comme à regret, abandonne la clarté pour retourner à l’ombre fraîche de la forêt.  
S’ouvre alors un nouveau chemin, large et fortement empierré, qui s’élève en pente soutenue à l’assaut de la colline, à l’abri des frondaisons.   
Ce sont toujours les mêmes essences fidèles qui hantent le sous-bois : haies serrées de charmes et de hêtres, chênes majestueux, érables et frênes en abondance. Les conifères, rares et presque exotiques ici, semblent des voyageurs perdus.  
Plus haut, vers le sommet de la colline où la pente se fait plus clémente, le chemin débouche sur des clairières silencieuses, parmi des prés qui ressemblent davantage à des pelouses sèches qu’à de grasses prairies.  
Une large route de terre battue s’étire alors en douceur sur le plateau, comme une ligne posée dans le ciel.  
La piste mène bientôt à un vaste ensemble de fermes, annonçant l’entrée dans Les Malbuissons.   
Puis la route descend vers le hameau, perdu en pleine nature, qu’elle traverse presque d’un souffle. Ce n’est pas un grand hameau, mais il a la discrétion de ces lieux qui ne se livrent qu’aux voyageurs attentifs.  
La petite route serpente ensuite dans une campagne plane, à travers un paysage de larges prairies entaillées de petits bosquets dispersés comme des îlots.  
Elle aboutit enfin à un carrefour stratégique au cœur de la nature. Ici, la coquille de Saint-Jacques s’unit à un autre grand itinéraire : la Via Francigena, qui descend d’Angleterre vers Rome. Rien que cela ! Deux pèlerinages qui se croisent, deux lignes de vie qui se saluent.  

Section 5 : Dans les pelouses sèches

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours vallonné, mais rien de trop difficile, avec une longue descente.

Une large route, à moitié faite de terre battue et mêlée de plaques de goudron usé, s’élève lentement le long d’un sous-bois aux allures mystérieuses. Elle serpente comme un ancien ruban marqué par le temps, aspirant déjà le voyageur vers les hauteurs, dans une ascension qui semble appeler autant les jambes que l’esprit.  
La pente se fait plus soutenue dès que l’on s’enfonce au milieu des feuillus. Là, s’élancent, fiers et vigoureux, de grands chênes qui dressent leurs colonnes séculaires comme pour soutenir le ciel. Les hêtres, omniprésents et majestueux, imposent leur ombre et leur silence. Les érables, par touches claires, allègent le décor, tandis que les châtaigniers rabougris, témoins courbés du passage du temps, se cramponnent encore au flanc de la colline.  
La montée, longue et persistante, se poursuit entre des clairières lumineuses et l’ombre fraîche des fourrés. Une coquille de pèlerin, posée comme un signe fragile, indique pour une fois la bonne direction. La flèche rassure le marcheur, et son éclat discret devient alors un compagnon de route, un guide au milieu des doutes et des bifurcations possibles.  
Au sommet de cette montée obstinée, le chemin s’ouvre soudain sur une ferme blottie à l’orée du bois.  

Sous l’ombre généreuse d’un vénérable châtaignier, dont les branches noueuses s’étirent comme les bras d’un patriarche, repose une table de pique-nique. Mais là, une coquille, malencontreusement tournée, oriente le voyageur vers une fausse direction. Parfois, c’est le hasard qui sauve : le propriétaire des lieux, habitué à ces erreurs, indique aimablement que le vrai chemin se poursuit tout droit, sur le sentier des Pelouses. Il confie voir régulièrement des pèlerins s’égarer à cause de ce mauvais repère, avant de se rendre compte, au milieu des barbelés et des fourrés impénétrables, que la voie s’interrompt brutalement. Cette coquille mal orientée illustre une fois de plus la difficulté, presque chronique, d’interpréter les signes des chemins dans cette région.

De l’aire de pique-nique, le chemin s’élève encore, gracieux et tranquille, jusqu’au sommet de la colline, comme pour offrir au pèlerin la récompense de la hauteur et de la vue après l’effort.  
Au sommet de la colline, le chemin s’incline soudain, vire et plonge doucement dans le sous-bois.  
Puis, comme une révélation après le couvert forestier, le chemin s’ouvre sur les pelouses sèches, lumineuses et vastes, baignées d’air et de silence. Pour une fois, et cela mérite presque d’être souligné tant l’événement est rare, une coquille se dresse bien orientée, telle une balise fidèle au milieu de tant d’indices trompeurs. Enfin, le pèlerin peut avancer d’un pas sûr, porté par cette discrète confirmation du chemin.  
La pelouse sèche n’est pas une simple étendue d’herbes. C’est un univers discret, presque secret, un écosystème fragile qui s’accroche aux sols arides et brûlés de soleil. Elle s’épanouit sur des coteaux calcaires ou sablonneux, là où l’eau se fait rare et où la chaleur s’accumule comme dans un four invisible. Le sol, pierreux, maigre, pauvre en humus, interdit aux grands arbres d’imposer leur règne. Seuls persistent quelques chênes rabougris, sentinelles miniatures aux troncs noueux, qui défient malgré tout l’aridité. Le reste n’est qu’une végétation basse, fine, rase, un tapis d’herbes dorées qui ploient au vent. Mais sous cette apparente austérité se cache une vie dense et ingénieuse : chaque plante, chaque insecte, chaque fleur semble avoir inventé mille stratégies pour tirer parti du peu, et transformer la disette en abondance.  
Puis le chemin sort des pelouses sèches, franchit une barrière.  
La descente reprend bientôt, brutale, la pente se faisant dure et soutenue, contraignant le marcheur à ralentir son pas. Plus bas, l’ombre revient, le chemin retrouve le sous-bois, et l’air plus frais. Le petit guide des Amis de Compostelle mentionne, à ce détour, la présence d’un aéroport de campagne. Mais vous aurez beau scruter l’horizon, écarquiller vos yeux ou tendre vos oreilles : rien, pas un signe tangible, ne vient attester de cette improbable piste perdue dans la nature. Pas de vrombissement lointain, pas de frémissement de métal, rien qu’un grand silence. Le seul aéroport ici est celui des oiseaux et des papillons.  

Le chemin achève enfin sa descente et atterrit sur une petite route de campagne. Un panneau indique Bucey-lès-Gy, mais le village demeure encore lointain, tapis dans le paysage. Ici, deux chemins célèbres se croisent pour mieux se séparer : la Via Francigena et le Chemin de Compostelle prennent des directions opposées, comme deux frères qui se saluent avant de poursuivre chacun son destin,

C’est alors une petite route qui s’avance nonchalamment à la lisière du bois. Elle semble se promener elle-même, sans contrainte, comme si le chemin voulait soudain ménager ses forces après les pentes abruptes.  
Plus loin, la route reprend un élan discret et s’élève en une pente douce, serpentant à travers la campagne. Les champs s’étendent de part et d’autre, ouverts comme des pages immenses où la main des hommes a tracé ses sillons.  
Vous traversez alors la région de la Pelouse de Folle, ce territoire incertain où la nature hésite, indécise, entre les pelouses sèches, frugales et pierreuses, et les terres cultivées, généreuses mais domestiquées. C’est un paysage de frontière, où s’entrelacent la sauvagerie et l’ordre, la spontanéité et la main de l’homme.  

Section 6 : Retour vers la civilisation

Aperçu général des difficultés du parcours : : parcours sans difficulté.

Plus loin encore, se dessine enfin à l’horizon le village de Bucey-lès-Gy, dominé par la silhouette de son église qui s’élève comme un phare de pierre au-dessus des toits.  
La route, fidèle compagne, s’incline alors en une pente plus soutenue, glissant vers le cœur du village. Celui-ci repose paisiblement dans une petite plaine, comme blotti entre les collines, protégé par la douceur du relief.  
À l’entrée du village, le regard se pose sur les maisons paysannes, couvertes de chaux aux teintes ocres ou grisâtres. Elles dégagent une simplicité robuste, fruit d’un savoir-faire ancestral, d’un mode de vie tourné vers l’essentiel. .  

Il semble qu’ici, la Via Francigena ait voulu s’accorder un détour, peut-être large, peut-être capricieux, pour finalement venir rejoindre le Chemin de Compostelle. Comme deux voies complices qui, après s’être longtemps ignorées, décident enfin de se retrouver.

Au cœur du village, la route s’aligne au rythme d’un petit ruisseau nommé la Morte. Malgré son nom qui semble annoncer silence et immobilité, il s’égrène doucement, filet d’eau claire qui accompagne le pas du voyageur.  
La route poursuit son chemin en longeant les façades anciennes du village. Au-dessus d’elles, comme un maître veillant sur ses fidèles, s’élève la silhouette imposante de l’église. Ses pierres, patinées par les siècles, dominent les toits avec une majesté tranquille.  
Peu après, le marcheur parvient près du lavoir communal, véritable joyau du patrimoine local. Inspiré par les plans en croix grecque, l’édifice s’impose par son élégance discrète : des pierres calcaires finement moulurées en dessinent les lignes pures. Situé au rez-de-chaussée, sous la mairie, le lavoir surprend par sa forme d’église à plan centré, où le bassin de source occupe symboliquement la place de l’abside. Construit en 1827 et inscrit depuis au titre des monuments historiques, ce lieu conjugue mémoire et utilité. Même aujourd’hui, il garde une fonction presque sacrée : l’eau qui y coule maintient une température douce, presque bienveillante, offrant un refuge lors des étés écrasés de chaleur. Ici, la pierre et l’eau dialoguent dans une harmonie qui traverse le temps.  
La route quitte bientôt le village en franchissant le petit ruisseau, comme un dernier adieu murmuré au marcheur qui s’éloigne. Ce passage marque une frontière douce : derrière soi, l’abri des maisons ; devant, l’appel de la route encore longue.   
Elle laisse alors derrière elle les dernières demeures, veillées par le monument aux morts de la guerre. Dans sa présence muette, il y a à la fois la douleur d’un passé et la fidélité d’un souvenir que le temps ne peut effacer.  
La route reprend son souffle et s’élève en pente légère, conduisant les pas vers une petite chapelle posée à la sortie du village. Elle se tient là, humble et accueillante, comme une vigie spirituelle accompagnant le pèlerin au seuil de la campagne.  
Peu après la chapelle, le parcours quitte la route départementale et s’élance dans la campagne, en pente plus soutenue. Mais rien n’y oblige : le pèlerin fatigué peut choisir de rester sur la route, car la journée a déjà été suffisamment exigeante. Ce détour mène vers la crête. De là-haut, le regard embrasse les alentours avant de redescendre et de rejoindre, un peu plus loin, la route principale. Ainsi, l’effort supplémentaire devient promesse d’horizon, mais chacun est libre de décider si ses jambes peuvent encore s’y risquer.  
Si vous choisissez de ne pas emprunter le détour par la crête, la route poursuit sa montée régulière, en pente douce, au cœur d’une campagne généreuse. Les champs s’ouvrent comme un large éventail, ponctués de haies, de fermes isolées et de bosquets. C’est une progression paisible, qui finit par rejoindre le chemin redescendant de la hauteur, comme deux ruisseaux qui se retrouvent après s’être séparés.  
Depuis ce croisement, l’entrée de Gy n’est plus très éloignée.  
La route s’allonge alors à travers la banlieue du petit bourg, succession de maisons modestes et de jardins.  

La partie basse du bourg ne retient pas longuement l’attention, si ce n’est par la présence d’un charmant hôtel, et par l’hôtel de ville, construit à la fin du XIXe siècle, qui se dresse avec sa façade imposante, rappelant l’ambition d’une époque où l’on voulait marquer la modernité dans la pierre.

Pour découvrir le vrai caractère de Gy, il faut gravir la colline et pénétrer dans le vieux village. Là se révèle une autre image de la cité, avec ses vieilles maisons des XVIIe et XVIIIe siècles, aux façades patinées.  C’est par ce passage que s’échappe le parcours vers Le Puy-en-Velay, tandis que l’autre voie, celle de Vézelay, se contente de traverser le bourg sans s’y attarder.  

Logements officiels sur le parcours de la Suisse et l’Allemagne à Cluny /Le Puy-en-Velay

 

  • Gîte des Monts de Gy, Bucey-lès-Gy ; 03 84 32 81 42/ 03 84 32 88 34 ; Gîte
  • Hôtel Le Pinocchio, Grand Rue, Gy; 03 84 32 95 95 ; Hôtel

Accueils jacquaires (voir introduction)

  • Bucey-lès-Gy (2)

 

Airbnb

  • Recologne (1)
  • Bucey-lès-Gy (2)
  • Gy (7)

Chaque année, le chemin évolue. Certains hébergements disparaissent, d’autres apparaissent. Il est donc impossible d’en dresser une liste définitive. Celle-ci ne comprend que les logements situés sur l’itinéraire ou à moins d’un kilomètre. Pour des informations plus détaillées, le guide Chemins de Compostelle en Rhône-Alpes, publié par l’Association des Amis de Compostelle, reste la référence. On y trouve aussi les adresses utiles des bars, restaurants et boulangeries qui jalonnent le parcours. Dans cette étape, il ne devrait pas y avoir de grands problèmes pour se loger. Il faut le dire : la région n’est pas touristique. Elle offre d’autres richesses, mais pas l’abondance des infrastructures. Aujourd’hui, airbnb est devenu une nouvelle référence touristique, que nous ne pouvons ignorer. C’est devenu la source la plus importante de logements dans toutes les régions, même les régions touristiques peu favorisées. Comme vous le savez, les adresses ne sont pas disponibles directement. Il est toujours vivement conseillé de réserver à l’avance. Un lit trouvé au dernier moment est parfois un coup de chance ; mieux vaut ne pas s’y fier tous les jours. Renseignez-vous, lors de vos réservations des possibilités de repas ou de petit déjeuner.

N’hésitez pas à ajouter des commentaires. C’est souvent ainsi que l’on monte dans la hiérarchie de Google, et que de plus nombreux pèlerins auront accès au site.
Etape suivante : Etape 9: De Gy à Marnay
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