19: St Gengoux-le-National à Cluny

Cluny, la lumière d’un monde disparu

DIDIER HEUMANN, ANDREAS PAPASAVVAS

 

Nous avons divisé l’itinéraire en plusieurs sections, pour faciliter la visibilité. Pour chaque tronçon, les cartes donnent l’itinéraire, les pentes trouvées sur l’itinéraire et l’état du parcours. Les itinéraires ont été conçus sur la plateforme “Wikilocs”. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’avoir des cartes détaillées dans votre poche ou votre sac. Si vous avez un téléphone mobile ou une tablette, vous pouvez facilement suivre l’itinéraire en direct.

Pour ce parcours, voici le lien:

 

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/de-saint-gengoux-le-national-a-cluny-par-la-voie-verte-167800441

Ce n’est évidemment pas le cas pour tous les pèlerins d’être à l’aise avec la lecture des GPS et des cheminements sur un portable, et il y a encore en France de nombreux endroits sans connexion Internet. De ce fait, vous trouverez bientôt sur Amazon un livre qui traite de ce parcours.

Si vous ne voulez que consulter les logements de l’étape, allez directement au bas de la page.

Cluny est une petite ville de Saône-et-Loire, au sud de la Bourgogne, connue dans toute l’Europe médiévale pour son abbaye. Fondée en 910 par Guillaume le Pieux, elle devint très vite un centre religieux et culturel majeur. Son abbaye, aujourd’hui en partie détruite, fut pendant plusieurs siècles la plus grande église du monde chrétien avant la construction de St Pierre de Rome. Cluny fut le cœur d’un immense réseau monastique : des centaines d’abbayes à travers l’Europe suivaient sa règle et dépendaient de son abbé. Les moines y vivaient selon la règle de saint Benoît, dans la prière, le travail et le silence. C’était aussi un lieu d’art, de musique et de savoir, où s’épanouirent la sculpture romane, la musique liturgique et la copie des manuscrits.

Mais l’histoire fut cruelle avec ce chef-d’œuvre. Après la Révolution, l’abbaye fut vendue comme bien national, puis démolie pierre par pierre. Ses voûtes colossales s’effondrèrent, les tours furent abattues, et les matériaux servirent à construire des maisons alentour. De l’immense abbatiale, longue de plus de 180 mètres, il ne subsiste aujourd’hui qu’une partie du transept sud, le clocher de l’eau bénite et quelques travées, qui suffisent pourtant à laisser deviner la grandeur passée. Malgré ces pertes, Cluny conserve un charme profond. Ses vestiges, ses bâtiments conventuels, son cloître reconstruit, ses maisons médiévales et ses ruelles paisibles racontent encore la puissance spirituelle et artistique qu’elle incarna. C’est un lieu de mémoire et de silence, mais aussi un lieu vivant, animé par ses festivals et ses visiteurs qui viennent retrouver ici un peu du souffle de la grande histoire monastique. 

Sur un tel parcours, qui n’est plus le Chemin de Compostelle, mais une voie alternative, il n’y a évidemment pas de coquille. Mais, comme la Voie Verte est continue d’une ville à l’autre, aucun fléchage n’est nécessaire. Bien sûr, certains pèlerins préféreront suivre le Chemin de Compostelle, arrivé la veille à St Gengoux-le-National. Pour ces derniers, voici le parcours.

Difficulté du parcours : Le trajet présente est quasi plat, avec parfois une minime pente que vous ne remarquerez guère (+71 mètres/-67 mètres). Ce n’est pas le cas si vous suivrez le Chemin de Compostelle fléché depuis St Gengoux-le-National (+367 mètres/-358 mètres).

État du parcours : Aujourd’hui, c’est une étape totalement sur le goudron de la piste cyclable :

  • Goudron : 22.5 km
  • Chemins : 0 km

Parfois, pour des raisons de logistique ou de possibilités de logement, ces étapes mélangent des parcours opérés des jours différents, ayant passé plusieurs fois sur sur ces parcours. Dès lors, les ciels, la pluie, ou les saisons peuvent varier. Mais, généralement ce n’est pas le cas, et en fait cela ne change rien à la description du parcours.

Il est très difficile de spécifier avec certitude les pentes des itinéraires, quel que soit le système que vous utilisez.

Pour les “vrais dénivelés”, relisez la notice sur le kilométrage sur la page d’accueil.

Voici un exemple de ce que vous trouverez. Il suffit de prendre en compte la couleur pour comprendre ce qu’elle signifie. Les couleurs claires (bleu et vert) indiquent des pentes modestes de moins de 10%. Les couleurs vives (rouge et brun foncé) présentent des pentes abruptes, le brun dépassant 15%. Les pentes les plus sévères, supérieures à 20-25%, très rarement plus, sont marquées de noir.

Section 1 : Sur la piste cyclable

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Depuis le bourg, il vous faudra redescendre près d’un kilomètre pour retrouver la piste cyclable. Tout en bas de St Gengoux-le-National, près de la voie ferrée disparue, se dresse l’Hôtel de la Gare, comme un témoin immobile d’un temps où les trains animaient la vallée. Aujourd’hui, c’est la piste cyclable qui en prolonge la mémoire, glissant discrètement à deux pas de ses murs. 
La piste s’engage ensuite dans un parc ombragé, longeant les rangées méthodiques de camping-cars, comme un étrange bivouac moderne installé sur les traces des anciens voyageurs. Elle file droit vers la départementale D49, qu’elle traverse rapidement sur un viaduc, coupant la route comme un fil tendu dans le tissu du paysage. 
Puis, soudain, elle se glisse sous les arbres. L’air y devient plus frais, presque humide, et l’on a l’impression d’entrer dans un couloir végétal. 
Ici, les peupliers juvéniles dressent leurs colonnes claires, et les frênes, en nombre, prennent parfois le pas sur les chênes eux-mêmes, comme si la nature avait voulu redistribuer les rôles de sa grande scène.
La piste se poursuit, monotone et fidèle à elle-même, toujours semblable, parfois légèrement sinueuse, mais le plus souvent rectiligne, ponctuée seulement par quelques intersections avec de petites routes transversales. Un kilomètre passe ainsi, dans un rythme lancinant, entre ombre et lumière.
Bientôt, elle franchit le ruisseau de la Nourue, qui s’écoule avec modestie mais dans un décor d’une grâce champêtre. Les herbes folles s’inclinent au vent, les saules s’y penchent comme pour écouter son murmure, et tout respire une douceur bucolique.
Au bord du ruisseau, la piste longe la petite gare des Condamines, bâtisse silencieuse et sans avenir, sans doute abandonnée pour l’éternité. Sa façade fermée, rongée par le temps, évoque encore les haltes d’autrefois, où quelques voyageurs pressés descendaient en hâte sur le quai.
Mais déjà la route reprend son allure obstinée. La piste s’élance de nouveau, droite, implacable, parfois jusqu’à l’ennui. Ce ne sont plus de vastes sous-bois qui l’enserrent, mais de belles haies de feuillus, denses et régulières, qui forment comme un corridor vert, balisant le chemin du cycliste ou du marcheur.

Section 2 : Ici, une belle rivière coupe la piste cyclable

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Puis, la piste cyclable s’étire encore, presque docile, sur près d’un nouveau kilomètre, toujours protégée par l’ombre bienveillante des feuillus. Leurs ramures se rejoignent parfois au-dessus de la voie, comme pour former une nef végétale où le voyageur avance en silence, enveloppé d’un parfum de mousse et d’humus.
Un peu plus loin, une nouvelle intersection se présente, comme une invitation au choix, un embranchement hésitant entre plusieurs chemins. Mais la piste garde sa logique, son obstination, et poursuit sa ligne imperturbable.
La voilà qui franchit alors la Grosne, la seule grande rivière de la région, que vous retrouverez plus loin encore sur votre parcours. Son cours, d’un peu plus d’une centaine de kilomètres, prend naissance dans les collines du Beaujolais, avant de se perdre dans la vaste Saône, près de Chalon-sur-Saône. Ici, vous remontez donc son courant, comme à contre-temps de son histoire. La Grosne, sombre et tranquille, dessine dans le pays de larges méandres, traçant ses courbes molles à travers prairies et peupleraies. Elle impose au paysage sa respiration lente, presque méditatives.
Et si, pour un instant, nous changions de lumière ? Oubliez le soleil éclatant et imaginez le même décor sous des cieux plus sévères : la pluie battante, lavant les feuillages et frappant la piste de ses doigts glacés ; ou bien le brouillard, envahissant ces plaines, au point de masquer l’horizon, brouillant les perspectives et rendant les lignes droites presque indiscernables. Ainsi va aussi la vie de ces paysages : multiple, insaisissable, changeante.

Après le passage de la Grosne, la piste longe la gare abandonnée de Malay, fantôme d’un passé ferroviaire, avant qu’une pancarte n’indique la direction de l’église de Malay. Mais les cyclistes, impatients de distance, et les marcheurs, happés par le fil du chemin, poursuivent tout droit, même par beau temps, sans se détourner.

Beaucoup plus loin, après 1 bon kilomètre de rectiligne, la piste passe sous un pont où s’élance la route reliant Malay à Cortemblin. Si l’on prend la peine de gravir la butte, on découvre, depuis ce promontoire, l’image presque déroutante de la piste : une ligne droite qui s’enfonce à perte de vue dans un horizon bouché, avalée par la brume ou par la monotonie. Là encore, la rectitude domine, car les trains, jadis, n’avaient que mépris pour les virages.

Section 3 : Encore des kilomètres sur la piste cyclable

Aperçu général des difficultés du parcours :parcours sans aucune difficulté.

Dans le brouillard, la piste poursuit son tracé, comme une ligne têtue qui ne cède pas à l’opacité du matin. Les seuls repères, modestes mais indispensables, deviennent des haltes discrètes : un banc qui invite au repos, une intersection qui propose l’hésitation, ou parfois une simple indication de détour, un chiffre qui mesure la patience du marcheur. Ici, la piste parvient à la bifurcation de Cormatin. Vous y croiserez sans doute nombre de cyclistes se dirigeant vers le village, happés par sa promesse. Cormatin, avec ses commerces vivants et ses restaurants accueillants, dresse une halte avant l’arrivée tant attendue à Cluny. Pour le cycliste, un détour d’un kilomètre n’est qu’une respiration dans l’élan. Pour le marcheur, c’est déjà une autre histoire : une hésitation, une fatigue à calculer. Ici, la piste se rapproche à nouveau de la Grosne, ce ruban d’eau qui accompagne la route comme une ombre mouvante. 
Évidemment, sous le voile du brouillard comme sous la lumière éclatante du soleil, cette rivière se transforme. Elle se fait présence spectrale, mystérieuse et grise lorsque les brumes l’enveloppent ; elle devient éclat, miroir éclaboussé de clarté, lorsque le soleil la révèle. Elle est à la fois la même et une autre, tantôt voix assourdie, tantôt chant éclatant. 
Toujours en suivant la haie des grands arbres, qui dessinent comme un corridor naturel, la piste rectiligne se tend et rejoint plus loin une nouvelle intersection pour Cormatin. Là, on décline les avantages touristiques avec l’insistance des panneaux qui invitent à découvrir encore davantage ; et, comme pour séduire le voyageur, on propose des boucles supplémentaires pour les cyclistes, promesses de détours joyeux ou de respirations imprévues.
Et la voie verte, ce jour perdue dans le brouillard, poursuit sa route avec obstination : droite comme une pensée fixe, lancinante comme une mélodie qu’on ne parvient pas à chasser, intransigeante comme une règle dont rien ne peut fléchir l’autorité. Elle impose son rythme au marcheur, sans concession.
Elle arrive bientôt au lieu-dit du Papyllon, où la gare, aujourd’hui muette, se dresse comme une cicatrice du temps passé. Délaissée, désaffectée, elle demeure pourtant témoin d’une époque où le train battait la campagne. Là, la piste franchit une petite départementale, discrète, au bord de laquelle un atelier de céramique se tient, presque comme une halte artistique au milieu de cette monotonie.
Sur cette piste uniforme, la lassitude peut guetter : la platitude, certes clémente pour les jambes, peut peser sur l’esprit. L’absence d’effort devient parfois un autre effort, celui de lutter contre l’ennui. Les rares points d’intérêt restent les intersections, ces croisées de la piste où l’on rêve qu’il se passe enfin quelque chose, comme un imprévu qui viendrait rompre la monotonie. En voici justement une nouvelle : à quelques pas, une autre intersection s’offre à vous, menant vers Ameugny ou Cortevaix. Ici, on vous invite à loger, là, à visiter une église romane, trésor ancien suggéré aux cyclistes. Pour vous, marcheur ou voyageur attentif, le message essentiel demeure plus prosaïque : il vous reste encore treize kilomètres avant Cluny. 
Le décor, ici, s’adoucit et se fait plus pastoral : ce sont des prairies verdoyantes qui s’étendent, paisibles, comme un tapis semé d’herbes mouvantes sous le vent. Les champs respirent une sérénité simple, et l’on devine, dans la fraîcheur de la rosée ou l’odeur de l’herbe coupée, une vie qui palpite discrètement. Les vaches, silhouettes paisibles, donnent à ce paysage un caractère familier, presque intime, comme si la campagne elle-même vous offrait son hospitalité.
Encore une intersection, presque immédiate, vous conduit à Ameugny, tout proche, à deux pas de la piste. À peine un kilomètre s’est écoulé depuis la dernière bifurcation, et déjà l’on vous rappelle que Cluny reste à douze kilomètres d’ici. Ce chiffre, inscrit sur les panneaux, agit comme une petite mesure du temps : une promesse pour les cyclistes pressés, un rappel d’effort pour les marcheurs patients. .
Rien ne vient accrocher le regard, rien ne fait scintiller l’œil dans ce tronçon, si ce n’est la certitude de vous rapprocher peu à peu de la grande départementale D981. Cette route, large et sonore, paraît annoncer le monde moderne qui s’impose de l’autre côté de la haie : voitures rapides, ruban gris qui file, contraste net avec la lenteur paisible de la voie verte.
Alors, vous voici parallèle à cette artère, avançant côte à côte, comme si deux temporalités marchaient ensemble : celle des moteurs et du bitume, pressée, tendue, et celle du pas tranquille ou de la roue fluide sur la piste cyclable. Les deux routes se suivent sans se croiser, chacune fidèle à son rythme, jusqu’à la bifurcation de Taizé.
Bientôt, la piste atteint cette bifurcation. Ici, une petite gare se dresse encore, et l’on croit deviner qu’elle est habitée, comme si elle refusait le sort des autres bâtisses abandonnées. Ce bâtiment, à la fois témoin du passé ferroviaire et signe de vie actuelle, donne à l’endroit une présence singulière, presque chaleureuse au milieu de la monotonie.

La communauté de Taizé se trouve non loin d’ici, à un kilomètre seulement de la piste cyclable. C’est une communauté monastique chrétienne, œcuménique et fraternelle, qui a pris racine dans ce coin de Saône-et-Loire en 1944, sous l’impulsion de Roger Schutz, pasteur suisse. Aujourd’hui, elle rassemble encore environ quatre-vingts frères venus de tous les horizons : catholiques, protestants, anglicans. Leur choix est celui de l’essentiel : une vie de prière, de simplicité, de partage et de célibat. Pour le voyageur, Taizé est à la fois une halte spirituelle et une fenêtre ouverte sur l’universel, un lieu hors du temps où l’on entend résonner la fraternité.

Section 4 : Toujours et encore sur la piste cyclable

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Depuis la bifurcation de Taizé, la piste cyclable reprend son cours, droite comme une idée obstinée, lisse et prévisible, presque monotone dans son éternelle régularité. Elle déroule son ruban d’asphalte sans fin, sans détour, sans surprise, parfois interrompue par la présence discrète d’un banc solitaire. Ces haltes paraissent souvent dérisoires, comme si le chemin, trop facile, n’exigeait jamais vraiment le repos. La voie avance sans effort, fidèle compagne longeant la départementale, témoin silencieux d’un voyage tranquille.
Un peu plus loin, elle s’insinue entre deux routes, fragile trait d’union tracé dans le paysage. À neuf kilomètres de Cluny, vous progressez encore, porté presque malgré vous par l’élan de la piste, comme happé par un mouvement que rien ne semble pouvoir arrêter. La distance n’est plus un obstacle, mais une évidence.
Puis, lasse de sa propre monotonie, et comme pour varier son décor, la piste s’accorde une fantaisie : elle franchit la grande départementale et se glisse de l’autre côté. Cette route, importante dans la géographie locale, ne porte pourtant pas le fardeau d’un trafic intense. Ici, on traverse une contrée clairsemée, à peine habitée, où les voitures ne troublent guère la quiétude. Le voyage se poursuit au rythme mesuré d’une campagne qui respire lentement.
La piste franchit alors, une dernière fois, la Grosne. Le cours d’eau demeure fidèle à lui-même : sombre et secret, il s’efface sous les frondaisons, disparaît dans l’entrelacs des saules, des aulnes et des broussailles. On croirait surprendre une confidence chuchotée entre les arbres et la rivière, un murmure de fraîcheur à l’ombre des feuillages.
Et la voie verte reprend, imperturbable, comme s’il avait seulement marqué une courte halte au bord de la rivière. La piste reste la même, étroite bande de goudron qui déroule sa simplicité sous la garde vigilante des chênes, des érables et des hêtres. Ces arbres, dressés comme des sentinelles patientes, filtrent la lumière, projettent leurs ombres mouvantes et offrent au cycliste la sensation d’avancer dans une nef silencieuse où chaque tronc est une colonne.
Sortant enfin des allées boisées et de la nature encore vierge, la piste se rapproche un instant de la civilisation. Elle longe alors la masse imposante d’une usine, silhouette grise plantée au bord du chemin. À Massilly, s’est enracinée une entreprise de renom, spécialisée dans la fabrication d’emballages métalliques. Fondée par Robert Bindschedler, cette usine incarne la solidité industrielle au cœur même d’un paysage campagnard. Le cycliste, en passant, sent la transition brutale : de la paix des arbres à la rumeur sourde des machines, de l’éternité végétale à l’éphémère du métal.
Puis la piste reprend son élan, longeant le bois de Banan, frôlant ses lisières. Elle reste fidèle à elle-même, mais toujours limitée, contenue, serrée sous les grands feuillus qui étendent leurs bras protecteurs. Ici encore, la nature enveloppe et tempère le voyage, comme si elle voulait rappeler que, malgré les intrusions humaines, c’est elle qui demeure la véritable maîtresse du paysage. 

Section 5 : Petit à petit, la piste cyclable se rapproche de Cluny

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans difficulté.

Sur la piste bitumée, qui s’étire à nouveau vers cet infini improbable où l’horizon semble se perdre, s’élève un cortège majestueux d’arbres. Les érables, superbes dans leur ramure flamboyante, se mêlent aux frênes chevelus dont les branches retombent en cascades. Ils prolongent l’alignement des grands chênes, solides comme des piliers antiques, et des hêtres élancés, dressés tels des colonnes d’une cathédrale sylvestre. Le voyage prend ici la solennité d’une procession naturelle, comme si chaque arbre, témoin du temps, accompagnait silencieusement les pas et les roues de ceux qui empruntent cette voie.  
Un peu plus loin, à travers la brume qui s’effiloche doucement, se devine la silhouette d’une belle demeure, dissimulée derrière un rideau d’arbres. Elle apparaît comme un secret chuchoté, une promesse d’histoire et de mémoire enfouies. Peu après, le chemin croise une intersection discrète avec une route agricole, simple piste de terre battue où l’on imagine passer lentement des engins aux pas lourds, témoins de la vie paysanne.  
Les lignes droites se succèdent alors, implacables, ponctuées de modestes intersections avec d’autres routes rurales. Le paysage se répète, presque envoûtant, comme une mélodie obstinée. Ici, aucun clocher, aucun hameau ne vient interrompre cette solitude : les villages restent éloignés, retranchés derrière les collines ou les bois, laissant le voyageur dans l’incertitude de sa position. On avance, sans repère, dans une géographie à la fois familière et insaisissable.
Pourtant, au détour d’un panneau, une bifurcation annonce Cortambert. Mais le village demeure lointain, à quatre kilomètres de la piste. Comme une promesse qui ne se laisse pas atteindre trop vite, il garde ses distances. 
Depuis ce croisement, l’histoire reprend son cours, identique et pourtant toujours neuve. La piste demeure fidèle à elle-même, bordée d’arbres. Leur présence, immuable, atténue la monotonie et rend le pas plus léger. On pourrait croire à une répétition, mais la répétition ici devient apaisement, une respiration douce qui fait de chaque pas une rencontre avec l’ombre et la lumière.
Dans le paysage alentour, s’ouvrent de petites prairies. Elles s’étendent comme des clairières offertes, parsemées de bétail tranquille. Les vaches et les chevaux, silhouettes paisibles, ponctuent l’herbe verte de leurs masses blanches ou brunes. La campagne reprend ses droits, simple et vivante.
Un peu plus loin encore, une nouvelle bifurcation se présente : celle de Lournaud. Elle marque une étape après dix-neuf kilomètres de parcours, comme un signe discret du chemin accompli. L’aventure se mesure ici non pas en fatigue, mais en distance apaisée. 
Alors, une petite route se met à accompagner la piste, comme une sœur jumelle, fidèle mais muette. Elle demeure vide, désertée de tout véhicule, et seule votre marche emplit l’espace. Parfois, un cycliste passe, silhouette éphémère filant au loin. La solitude reste la compagne principale, douce et persistante.
Mais déjà l’approche d’une belle ville se devine. Il est temps de rallumer la lumière, de quitter ce brouillard obstiné pour accueillir un peu de soleil. Car nos récits ont toujours privilégié le beau temps, ce ciel clair qui donne aux étapes leur éclat. Pourtant, il n’est pas inutile, parfois, de montrer la rudesse : ce que connaissent tous les pèlerins, tous les marcheurs, lorsque la pluie, la grisaille ou la brume s’invitent. Le chemin est fait de lumière et d’ombre, et chaque voyage garde la trace des deux.

Alors la piste passe sous la ligne de la LGV. Ici, c’est le TGV Paris–Lyon qui rugit lorsqu’il s’élance. Le grondement traverse l’air comme un éclair de métal, rappel brutal du monde moderne. Le train file, impérieux, tandis que la piste reste là, humble et silencieuse. Deux vitesses du temps se croisent : celle, fulgurante, de la machine et celle, patiente, du voyageur.

Section 6 : La piste cyclable arrive à Cluny

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

La piste continue, sous la lumière retrouvée, filtrée par les grands arbres qui veillent comme de vieux gardiens. Leurs ramures ouvrent des clairières de clarté où l’on respire un peu mieux, comme si la route, assombrie jusque-là, retrouvait soudain le goût du jour. 
Peu après, derrière les arbres, s’élargissent à nouveau les prairies. Elles apparaissent comme une promesse d’espace et de liberté, s’ouvrant en tapis verts où le regard peut se perdre.  
Alors, derrière de simples hangars agricoles, surgit une vision inattendue : des alignements entiers de vans à chevaux, comme une armée silencieuse prête à prendre la route. Ces silhouettes blanches et métalliques dessinent un décor insolite, presque théâtral, rappelant la place importante de l’équitation dans cette terre de Cluny.  
Là-bas, dans un horizon proche, file le train à grande vitesse. Sa silhouette effilée coupe le paysage d’un trait de fer et de vitesse. En un éclair, il traverse le décor, rappelant la coexistence de deux mondes : celui, immobile et contemplatif, du marcheur, et celui, fulgurant, du voyageur propulsé à vive allure.  
Bientôt, à votre droite, se dessine le clocher de l’église de Cluny. La piste cyclable touche à sa fin, comme une phrase qui trouve enfin son point. Le parcours s’achève dans cette vision, promesse d’arrivée, d’histoire et de mémoire.  
Pour les passionnés de la petite reine, la piste cyclable poursuit son cours au-delà, mais pour vous, elle s’interrompt près du parking, à deux pas d’un centre équestre. C’est Cluny déjà, à seulement un kilomètre du centre. La ville se devine dans ses contours, entre patrimoine et quotidien.  
Ici, vous rejoignez le chemin officiel de Compostelle, celui qui descend depuis St Gengoux-le-National. Vous retrouvez alors la coquille familière, signe universel des pèlerins, compagnon de route millénaire. Le chemin emprunte la rue des Brouillards, comme s’il voulait, une fois encore, traverser un voile de mystère avant d’atteindre les portes de la cité. 
Encore quelques pas sur la route de Bellecroix, dans la proche banlieue… 
…puis un petit chemin, discret et protecteur, vous détourne des voitures pour vous mener vers un pont. Ce passage, presque furtif, vous conduit au cœur même de la ville, comme une entrée symbolique vers le centre vivant.
La route traverse alors une fois de plus la Grosne, et le paysage s’ouvre soudain. La rivière se déploie dans la lumière, et au-delà s’offre la cité de Cluny, avec ses toits, ses clochers, ses souvenirs médiévaux. L’eau devient miroir de pierre et d’histoire.

Ici, le voyageur a le choix : contourner le centre-ville et s’égarer du côté des parcs à chevaux, ou bien continuer tout droit vers la vie commerçante. La Rue de la Levée, la rue Lamartine et la rue Mercière conduisent alors jusqu’au cœur animé de Cluny. Passons par là. tout droit.

Le centre, avec ses commerces et ses ruelles, possède le charme simple d’une petite ville de province. Cluny, ce n’est que cinq mille habitants, mais certains jours, les visiteurs sont presque aussi nombreux que les résidents. La cité respire à la fois la tranquillité d’un village et l’effervescence d’un carrefour culturel.
Sur votre parcours, près de l’Office de tourisme, vous croiserez l’église Notre-Dame, l’autre grande église de Cluny. Ici, vous êtes à deux pas de l’abbaye.
Une alternative s’offre également à vous depuis le pont qui enjambe la Grosne : il suffit alors de suivre vers votre droite, en direction du bas de la ville, où s’alignent de nombreux parkings. Cet itinéraire vous conduit dans un espace plus ouvert, d’où la cité médiévale se dévoile peu à peu, telle une promesse d’histoire et de mémoire.

Très vite, vos pas sont happés par la silhouette imposante de l’abbaye, qui surgit au détour des ruelles tortueuses, comme un repère éternel au cœur du dédale urbain. Ses tours se perdent et se retrouvent au gré des perspectives, semblant guider le promeneur dans ce labyrinthe où chaque pierre résonne encore des voix anciennes.

Le parcours vous mène rapidement devant la Tour ronde de l’Abbaye, dont la présence massive semble défier le temps. Jadis, elle constituait l’un des éléments les plus impressionnants du système défensif médiéval de la cité. C’est en 1160 que commencèrent les premières fortifications, dessinant peu à peu les contours d’une cité sous tension et sous protection. La menace des seigneurs voisins planait en effet sur la communauté monastique. Alors s’éleva une nouvelle muraille, plus vaste et plus solide que la précédente. La nouvelle muraille, longue de 1,33 kilomètre, épaissie sur 1,18 mètre et culminant entre 6,50 et 8 mètres, devint leur rempart contre les périls du temps.
Ici se concentrent les centres équestres, à deux pas de l’hippodrome. L’air semble vibrer du martèlement des sabots, et parfois vous aurez l’impression qu’il y a autant de cavaliers que de visiteurs à pied dans cette capitale du cheval. La ville tout entière respire au rythme des montures et des hommes qui les guident, comme si l’esprit de Cluny trouvait encore aujourd’hui une part de sa grandeur dans cet héritage vivant.
En poursuivant votre marche, vous longez le mur d’enceinte de l’abbaye. Ces pierres massives, patinées par le temps, rappellent silencieusement la puissance et la permanence de ce haut lieu spirituel, qui continue de dominer la cité par sa majesté.
Au bout de la muraille se dresse le haras national de Cluny, offrant une superbe perspective sur l’abbaye. Fondé en 1807 par Napoléon Ier, sur les fondations mêmes de l’ancienne abbaye, ce haras demeure l’un des plus éloquents témoignages de la tradition équestre en Bourgogne. Longtemps, il fut un centre prestigieux dédié à l’élevage et à l’amélioration des chevaux, contribuant à façonner les plus belles lignées. Aujourd’hui encore, installé dans les dépendances historiques de l’abbaye, il conjugue patrimoine et passion du cheval. Le visiteur y découvre de splendides bâtiments et des écuries chargées d’histoire, mais aussi des présentations, des spectacles et des démonstrations qui célèbrent le savoir-faire équestre. Ce lieu est devenu un espace vivant, ouvert aux arts, à la culture et aux curieux, où l’élégance et la force des chevaux rencontrent la mémoire des siècles passés.

Puis, en contournant à nouveau la muraille par la rue de la Porte de Paris, vos pas vous conduiront naturellement vers l’abbaye. Le chemin, rythmé par les tours et les remparts, semble vous guider comme une main invisible vers le cœur battant de la cité.
Enfin, une vaste place s’ouvre devant l’entrée de l’abbaye, dominée par la noble silhouette de l’Hôtel de Bourgogne. Ses façades aux tons d’ocre lumineux se parent de teintes changeantes au gré de la lumière, comme si les pierres elles-mêmes voulaient saluer les visiteurs et les convier à franchir le seuil du sanctuaire.

Section 7 : Visite de l’Abbaye de Cluny

L’abbaye de Cluny fut fondée en 910 par Guillaume Ier, duc d’Aquitaine, qui la plaça directement sous l’autorité du pape, garantissant ainsi son indépendance. La première église, dite Cluny I, construite sous l’abbé Bernon, était modeste et adaptée à une petite communauté de moines bénédictins. Avec l’accroissement rapide de l’ordre clunisien, une deuxième église, Cluny II, fut édifiée vers le milieu du Xe siècle. Plus vaste et plus richement décorée que la première, elle reflétait déjà l’influence grandissante de Cluny dans le monde chrétien. Le sommet de la puissance monastique survint au XIe siècle, sous l’abbé Hugues de Semur. En 1088, il lança la construction de Cluny III, une église gigantesque achevée au début du XIIe siècle et consacrée en 1130. Longue de près de 187 mètres, dotée de cinq nefs, de deux transepts, d’un vaste chœur entouré de chapelles rayonnantes et de clochers monumentaux, elle fut pendant des siècles la plus grande église de la chrétienté, avant la reconstruction de St Pierre de Rome. Autour de cette abbatiale s’élevèrent le cloître, les dortoirs, la salle capitulaire et de nombreux bâtiments conventuels, adaptés à une communauté de plusieurs centaines de moines. Cependant, à partir du XIVe siècle, la puissance de Cluny déclina, affaiblie par les guerres, les crises religieuses et économiques. À la Révolution française, l’abbaye fut supprimée et son église vendue comme carrière de pierre. La plupart des bâtiments furent détruits entre 1798 et 1823. Aujourd’hui, il ne subsiste que certains vestiges de Cluny III, mais ceux-ci permettent encore d’imaginer la splendeur de ce chef-d’œuvre de l’art roman et l’importance de son rayonnement spirituel et culturel en Europe médiévale.

Vous pénétrez dans l’abbaye depuis la place. 
La visite (12 Euros) commence par le petit cloître. Celui-ci était situé au sud de la grande église abbatiale. Construit sans doute à la fin du XIe siècle ou au début du XIIe, il formait un espace plus intime que le grand cloître, cœur de la vie monastique. Comme tout cloître roman, il consistait en une cour carrée entourée de galeries couvertes, soutenues par des colonnettes et décorées de chapiteaux sculptés. Ces galeries permettaient aux moines de circuler à l’abri et offraient aussi un lieu de méditation et de silence. Contrairement au grand cloître, autour duquel se regroupaient les principaux bâtiments conventuels, le petit cloître avait une fonction plus secondaire. Il servait de transition vers des espaces de service ou des activités pratiques, offrant ainsi un cadre plus discret et plus fonctionnel à la communauté. Détruit au XIXe siècle, lors du démantèlement de l’abbaye après la Révolution, le petit cloître a presque entièrement disparu. Il n’en reste aujourd’hui que des vestiges archéologiques et quelques fragments sculptés, que l’on visite comme dans un musée virtuel. 

Voici à quoi devait ressembler Cluny III.

La visite se poursuivit par une transition à travers une aile du cloître en restauration, où les pierres encore blessées semblaient hésiter entre ruine et renaissance. Bientôt, l’espace s’ouvrit à ciel ouvert, comme un souffle libéré, là même où s’élevait jadis la grande nef.  
On sait aujourd’hui bien des choses de la nef de Cluny III, grâce aux fouilles archéologiques, aux relevés anciens et aux descriptions précieuses des chroniqueurs médiévaux. Elle fut, à son temps, l’une des merveilles les plus saisissantes de l’abbatiale. Avec ses quelque 187 mètres de longueur, elle semblait tracer un chemin d’éternité sous la voûte des cieux. Sa structure se déployait en cinq vaisseaux : au centre, une nef immense, inondée de lumière, flanquée de chaque côté de deux collatéraux qui l’accompagnaient comme une armée de pierres en procession. Cet agencement ne servait pas seulement à accueillir une multitude de moines et de pèlerins, il exaltait aussi une idée de monumentalité, de grandeur à la mesure de la foi. L’élévation intérieure s’organisait en trois registres superposés : les grandes arcades, les tribunes, qui offraient des chemins suspendus au-dessus du silence ; et enfin les fenêtres hautes, d’où la lumière descendait sur la nef. La voûte en berceau brisé, innovation hardie par rapport au plein cintre classique, redistribuait les forces avec une intelligence nouvelle, tandis que les collatéraux, voûtés d’arêtes, soutenaient l’ensemble. La nef de Cluny III fut une prouesse technique autant qu’un manifeste spirituel.

Aujourd’hui, presque tout a disparu de cette nef grandiose, engloutie par les destructions qui suivirent la Révolution. Mais il suffit d’un fragment de mur, d’une fondation qui affleure, pour que l’imagination recompose la splendeur perdue. Ces pierres éparses deviennent alors des vestiges habités : elles portent encore, comme une mémoire muette, l’ombre de la nef immense. Voici deux images : l’une, extraite des dossiers du Louvre, rend compte de ce que l’histoire nous a transmis ; l’autre, confiée à l’imagination de ChatGPT, tente d’approcher, en rêve, ce que l’œil ne verra plus jamais.  

Dans l’espace gisent les socles incroyables de fûts de colonnes, comme des témoins figés d’un monde englouti. Ces bases massives, rongées par le temps, posent à l’œil la question de leur âge véritable : sont-elles les plus anciennes assises de l’abbatiale ou les ultimes vestiges d’une reconstruction oubliée ? Mystère de la pierre, qui garde en silence la mémoire de ses bâtisseurs.  
La visite se poursuit alors au niveau du transept. Monumental, il portait en lui toute la démesure de l’abbatiale. Il ne se contentait pas de croiser la nef : il s’étendait, immense, comme deux bras de pierre ouverts à l’est et à l’ouest, dessinant dans l’espace une croix latine aux proportions colossales. Ses dimensions elles-mêmes frappent l’imagination : près de 37 mètres de largeur pour chaque bras, plus de 60 mètres pour l’ensemble. Chaque croisillon, tel un sanctuaire dans le sanctuaire, abritait ses chapelles rayonnantes où se célébraient simultanément des messes, signe éclatant de l’intensité liturgique propre à Cluny. Dans cette ampleur, les processions monastiques pouvaient se déployer, se croiser, se répondre comme des voix dans un chœur, sans troubler l’ordonnancement majestueux des offices. Aujourd’hui, il n’en reste que des fragments, mais les fouilles et les relevés suffisent à ressusciter ce transept gigantesque, carrefour battant de l’abbatiale, où le temps lui-même semblait suspendu sous la voûte.  

Près du transept s’élèvent encore quelques chapelles, comme des survivantes adossées aux ruines. Parmi elles, la chapelle dédiée à St Martial attire le regard. Elle ne remonte pas à la première construction, mais fut rebâtie au XIVe siècle sur les fondations d’une chapelle romane. Son style gothique, sobre mais élancé, révèle sa nature plus funéraire que monastique, offrant un contraste avec la solennité monumentale de la grande église.  

À travers les siècles, les générations n’ont pas toujours su protéger les monuments hérités de leurs ancêtres. Partout en Europe, les églises furent rebâties, transformées, agrandies. Mais ici, à Cluny, il ne s’agit pas d’une évolution naturelle : ce fut une véritable mutilation. Le schéma présenté montre, en hachuré, la seule partie demeurée de l’immense abbatiale, comme si l’histoire avait réduit une cathédrale de lumière à une poignée de pierres.

Le cloître de Cluny, établi au sud de l’abbatiale, formait le véritable cœur de la vie monastique. C’est là, dans le silence des galeries couvertes, que les moines passaient d’un espace à l’autre : de l’église à la salle capitulaire, du réfectoire au dortoir. Mais le cloître n’était pas qu’un passage : il était un lieu d’apaisement et de contemplation. Le jardin central, image du paradis, rappelait aux frères l’harmonie perdue et promise, tandis que les arcades successives offraient à chaque pas un cadre sur le ciel. Construit une première fois au Xe siècle, il fut magnifié au XIe siècle, afin d’être à la mesure de Cluny III. Aux XIVe et XVe siècles, certaines galeries furent reprises dans un style gothique plus délicat, enrichies de réseaux sculptés qui affinaient l’austérité romane. Puis vinrent les épreuves : le temps, les guerres et surtout la Révolution, qui en firent une ruine. Déjà au XVIIIe siècle, des réparations avaient été engagées, mais elles restèrent inachevées. Du cloître d’autrefois, il ne reste aujourd’hui qu’une partie, restaurée au XIXe siècle. Dans ce mélange d’éléments romans, gothiques et modernes se lit une histoire entière : celle d’une grandeur éclatante, de destructions brutales et de renaissances patientes.  

Jouons un peu avec CHATGPT. Voici ce que propose le logiciel pour le cloître originel de Cluny III. On ne doit pas être très éloigné de la réalité.

En sortant dans le jardin, vos yeux découvrent ce que sont devenus les anciens communs de l’abbaye. Les bâtiments qui se dressent aujourd’hui ne sont pas ceux qu’avaient connus les moines ; ils sont des héritiers tardifs, fruits de reconstructions ou d’usages successifs. Que sait-on, en vérité, des origines ? Le dortoir principal des frères se situait au sud de l’abbatiale, directement accolé au cloître, comme le veut la tradition bénédictine. Là, dans une vaste salle aux lignes sobres, dormaient les moines : chacun sur une paillasse ou un lit rudimentaire, parfois abrité par une mince cloison de bois, fragile frontière entre les sommeils. L’espace, voûté et austère, n’était éclairé que par de petites fenêtres percées dans l’épaisseur du mur. Un escalier, discret mais essentiel, menait droit au sanctuaire, permettant de rejoindre à la nuit les offices sans avoir à traverser les espaces profanes. Non loin de là se trouvait le réfectoire, vaste salle rectangulaire percée de larges baies, où le repas se prenait dans un silence habité. Alignés sur de longs bancs, les moines recevaient leur part de pain et de soupe, tandis qu’un lecteur, à voix claire, leur offrait les nourritures de l’esprit : récits bibliques, vies édifiantes des saints. Ainsi, la nourriture terrestre s’unissait à la manne spirituelle, rappelant que la règle bénédictine était une symphonie de silence, de régularité et de communauté partagée.

Aujourd’hui, ce que vos pas foulent et vos yeux observent autour de Cluny n’est plus qu’un héritage morcelé. La Révolution, implacable, a abattu la grande abbatiale et dispersé de nombreux bâtiments conventuels. Les pierres furent revendues, intégrées dans des maisons villageoises ou dans des constructions civiles, comme si la chair même du monastère s’était dissoute dans le corps de la cité. Au XIXe siècle, une partie des ruines fut restaurée avec une ferveur romantique, d’autres éléments furent reconstruits ou transformés pour de nouveaux usages publics. Ce qui subsiste et se donne aujourd’hui à voir porte donc une double mémoire : celle, mutilée, du Moyen Âge, et celle, policée, des reconstructions modernes. L’œil contemporain peut s’y tromper : ces lignes trop nettes, ces pierres trop régulières ne traduisent pas la rugosité des ruines médiévales, mais la patiente reconstitution des XIXe et XXe siècles.

Pourtant, un souffle véritable du XIIIe siècle subsiste encore dans les murs du farinier et du cellier de Cluny. Ces deux édifices, survivants obstinés de la grande époque, portent dans leurs pierres la mémoire du gothique naissant. Le Farinier, élevé vers le troisième quart du XIIIe siècle, est une construction solide, à la fois fonctionnelle et majestueuse. À son rez-de-chaussée s’ouvre un cellier aux voûtes d’ogives, où l’ombre fraîche abritait jadis les réserves. L’étage supérieur, le grenier à farine, garde encore sa charpente d’origine, une forêt de poutres en chêne et châtaignier, datée avec précision au milieu du XIIIe siècle grâce à la science minutieuse de la dendrochronologie. Mais le bâtiment ne se présente plus dans son intégrité : seuls les deux tiers du farinier primitif nous sont parvenus, témoins partiels d’un édifice jadis plus ample. Certaines parties furent reprises ou modifiées à l’époque moderne, notamment au XVIIIe siècle, quand des travaux touchèrent l’ensemble conventuel.  

Le jardin est immense, calme, serein, ceint de ses murailles, avec en perspective l’Abbaye.

Logements officiels sur le parcours de la Suisse et l’Allemagne à Cluny /Le Puy-en-Velay

 

  • Camping municipal, 30 Rue des Griottons, Cluny; 03 85 59 08 34 ; Camping
  • Communauté Sœurs St Joseph, 7 Rue Ste Odile, Cluny; 06 11 95 08 43 ; Gîte
  • Cluny Séjour, 22 Porte de Paris, Cluny; 03 85 59 08 83 ; Hébergement collectif
  • Hôtel du Commerce, Place du Commerce, Cluny; 09 67 36 68 77/06 80 30 99 29 ; Hôtel
  • Hôtel de l’Abbaye, 14 ter Avenue Charles de Gaulle, Cluny; 03 85 59 11 14 ; Hôtel
  • Hôtel de Bourgogne, 1 Rue Porte des Prés, Cluny; 03 85 99 00 58 ; Hôtel

Accueils jacquaires (voir introduction)

  • aucun

Airbnb

  • Cluny (17)

Chaque année, le chemin évolue. Certains hébergements disparaissent, d’autres apparaissent. Il est donc impossible d’en dresser une liste définitive. Celle-ci ne comprend que les logements situés sur l’itinéraire ou à moins d’un kilomètre. Pour des informations plus détaillées, le guide Chemins de Compostelle en Rhône-Alpes, publié par l’Association des Amis de Compostelle, reste la référence. On y trouve aussi les adresses utiles des bars, restaurants et boulangeries qui jalonnent le parcours. Dans cette étape, il ne devrait pas y avoir de grands problèmes pour se loger. Aujourd’hui, airbnb est devenu une nouvelle référence touristique, que nous ne pouvons ignorer. C’est devenu la source la plus importante de logements dans toutes les régions, même les régions touristiques peu favorisées. Comme vous le savez, les adresses ne sont pas disponibles directement. Il est toujours vivement conseillé de réserver à l’avance. Un lit trouvé au dernier moment est parfois un coup de chance ; mieux vaut ne pas s’y fier tous les jours. Renseignez-vous, lors de vos réservations des possibilités de repas ou de petit déjeuner.

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