11: Abbaye d’Acey au Mont Roland

Sur les crêtes et dans les forêts denses du Bas Jura

DIDIER HEUMANN, ANDREAS PAPASAVVAS

 

 

Nous avons divisé l’itinéraire en plusieurs sections, pour faciliter la visibilité. Pour chaque tronçon, les cartes donnent l’itinéraire, les pentes trouvées sur l’itinéraire et l’état du parcours. Les itinéraires ont été conçus sur la plateforme “Wikilocs”. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’avoir des cartes détaillées dans votre poche ou votre sac. Si vous avez un téléphone mobile ou une tablette, vous pouvez facilement suivre l’itinéraire en direct.

Pour ce parcours, voici le lien:

 

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/de-labbaye-dacey-au-mont-roland-dole-par-le-chemin-de-compostelle-80455784

Ce n’est évidemment pas le cas pour tous les pèlerins d’être à l’aise avec la lecture des GPS et des cheminements sur un portable, et il y a encore en France de nombreux endroits sans connexion Internet. De ce fait, vous trouverez bientôt sur Amazon un livre qui traite de ce parcours.

Si vous ne voulez que consulter les logements de l’étape, allez directement au bas de la page.

Aujourd’hui, le parcours fait une brève incursion dans le Bas-Jura. Cette région n’a rien de commun avec le Haut-Jura et ses montagnes abruptes, voisines de la Suisse. Ici, tout est plus apaisé, plus secret. Le Bas-Jura ne cherche ni l’éclat ni le spectaculaire : il s’offre avec lenteur, comme une confidence. La montagne s’y efface peu à peu, se fait plus tendre, comme une bête qui se repose. Ses derniers contreforts se déploient en collines arrondies, en épaules boisées, en crêtes basses que gardent les hêtres et les charmes, compagnons anciens et discrets de ces paysages. Au détour des chemins, surgissent des villages bâtis de pierre blonde, dominés par leurs clochers comtois. Plus loin, sous la silhouette du Mont Roland, Dole se dessine, ancienne capitale comtoise posée au bord du Doubs, comme un bijou serti dans la vallée.

Le Bas-Jura n’est ni tout à fait la plaine, ni tout à fait la montagne. C’est un pays d’entre-deux, un carrefour discret où la Bourgogne toute proche rencontre les premiers plissements du Jura. Ici, les horizons s’ouvrent avec ampleur, offrant les ondulations infinies du paysage. Pourtant, malgré cette respiration large, une impression d’intimité subsiste, comme si chaque chemin, chaque croix de pierre, chaque chapelle voulait confier son propre secret. Terre de passage et de mémoire, le Bas-Jura porte en lui l’empreinte des pèlerins, des paysans, et continue d’offrir à celui qui marche son silence et ses horizons ouverts.

Le Mont Roland, dans ce décor, n’est pas une montagne imposante ni farouche. C’est une colline sanctuaire, un belvédère naturel, une élévation douce du Bas-Jura, dressée au-dessus de la plaine comme une main tendue vers le ciel. De loin, on distingue son clocher, silhouette familière qui veille sur les villages et accompagne le pas des pèlerins. Depuis des siècles, il attire les marcheurs de Compostelle, qui trouvent ici un lieu de halte et de recueillement. Les coquilles gravées sur les pierres, les croix plantées au détour des chemins témoignent de cette fidélité séculaire. Autour du monastère, les sentiers s’enroulent sous les arbres, bordés de statues, de croix de pierre, d’oratoires qui rythment la marche comme autant de stations d’un pèlerinage intérieur. Parmi elles, la Vierge Noire, mystérieuse et poignante dans ses habits de bois, recueille les prières silencieuses. Elle incarne ce mélange de ferveur, de mystère et de simplicité qui fait du Mont Roland non seulement un lieu de passage, mais un lieu de présence.

Comment les pèlerins planifient-ils leur parcours ? Certains s’imaginent qu’il suffit de suivre le fléchage. Mais vous constaterez à vos dépens que le fléchage est souvent déficient. D’autres utilisent les guides à disposition sur Internet, eux aussi souvent trop élémentaires. D’autres préfèrent le GPS, à condition d’avoir importé sur le téléphone les cartes de Compostelle de la région. En utilisant cette manière d’opérer, si vous êtes un expert de l’utilisation du GPS, vous ne vous perdrez pas, même si parfois le parcours proposé n’est pas exactement le même que celui proposé par les coquilles. Mais, vous arriverez sauf à la fin de l’étape. En la matière, le site qu’on dira officiel est le parcours européen des Chemins de Compostelle (https://camino-europe.eu/). Dans l’étape du jour, la carte est correcte, mais ce n’est pas toujours le cas. Avec un GPS, il est encore plus sûr d’utiliser les cartes Wikilocs que nous mettons à disposition, qui décrivent le parcours actuel fléché. Mais tous les pèlerins ne sont pas des experts de ce type de marche, qui pour eux, défigurent l’esprit du chemin. Alors, vous pouvez vous contenter de nous suivre et de nous lire. Chaque embranchement difficile à déchiffrer du parcours, a été signalé, pour vous éviter de vous perdre.

Difficulté du parcours : Le trajet n’est pas sans difficulté, quoique les dénivelés (+ 480 mètres/-346 mètres) restent encore assez raisonnables pour une très longue étape. Trois bosses sérieuses caractérisent le parcours. La plus sévère est sur la colline de Offlanges, mais la montée vers Gredisans, et la montée sur le Mont Roland nécessiteront aussi quelques gouttes de sueur.

État du parcours : Aujourd’hui, c’est une étape légèrement supérieure en chemins par rapport aux routes :

  • Goudron : 13.7 km
  • Chemins : 15.7 km

Parfois, pour des raisons de logistique ou de possibilités de logement, ces étapes mélangent des parcours opérés des jours différents, ayant passé plusieurs fois sur sur ces parcours. Dès lors, les ciels, la pluie, ou les saisons peuvent varier. Mais, généralement ce n’est pas le cas, et en fait cela ne change rien à la description du parcours.

Il est très difficile de spécifier avec certitude les pentes des itinéraires, quel que soit le système que vous utilisez.

Pour les “vrais dénivelés”, relisez la notice sur le kilométrage sur la page d’accueil.

Voici un exemple de ce que vous trouverez. Il suffit de prendre en compte la couleur pour comprendre ce qu’elle signifie. Les couleurs claires (bleu et vert) indiquent des pentes modestes de moins de 10%. Les couleurs vives (rouge et brun foncé) présentent des pentes abruptes, le brun dépassant 15%. Les pentes les plus sévères, supérieures à 20-25%, très rarement plus, sont marquées de noir.

Section 1 : Le long de l’Oignon, que l’on ne voit guère

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans difficulté.

Le parcours quitte l’abbaye en descendant la route. Le regard se retourne un instant vers les murs séculaires, comme pour emporter avec soi un dernier fragment de silence. L’air semble encore habité du murmure des offices, mais déjà, la pierre se perd derrière les arbres, et commence le parcours vers l’horizon. 
La route s’incline doucement, telle une coulée de ruban gris entre les prés et les champs de maïs. De part et d’autre, les frênes au port altier et les chênes robustes alternent avec quelques érables, compagnons familiers de cette terre comtoise. Ils veillent sur le marcheur comme des silhouettes immobiles, gardiens muets du passage.
La descente s’achève sur une intersection. Une autre route vient couper la sienne à angle droit, et la coquille Saint-Jacques, posée discrètement sur un poteau, indique la direction de Brésilley. C’est à droite qu’il faut tourner, et déjà se dessine la trace du pèlerinage.
Mais l’itinéraire ne se laisse pas enfermer dans la logique des routes modernes. Après quelques instants à suivre ce ruban vers Brésilley, il bifurque soudain, presque capricieux. Ici, une fois encore, il faut se méfier des coquilles, qui parfois désorientent : ce n’est pas leur orientation qui guide, mais bien la flèche associée. Ainsi, c’est à gauche que le parcours s’ouvre, détournant le marcheur vers un autre paysage.
Au début, la route garde encore quelques arbres en bordure. Leurs frondaisons éparses adoucissent la lumière et tempèrent la rigueur du ciel. Mais cette protection est de courte durée.
Très vite, la plaine se déploie dans toute sa nudité. Plus d’ombre, plus de limite : seulement les prés et les maïs à perte de vue, sous un ciel immense. Le marcheur devient alors minuscule, une silhouette qui avance dans l’infini monotone de la terre cultivée.
C’est ici une terre vulnérable, où la route elle-même se sait fragile. Car elle longe l’Oignon, rivière capricieuse, dont les crues débordent sans peine. Par gros temps, l’eau envahit la chaussée et la rend impraticable. Quelques trouées dans les haies, ouvertes comme des fenêtres, laissent parfois entrevoir l’Oignon qui glisse, discret ou furieux selon la saison.
Puis, la route s’écarte du fleuve, et avec lui disparaît l’ombre rare des arbres. Le soleil règne de nouveau sans partage. Dans cette plaine nue, la route file droit, obstinée, comme si elle s’orientait vers une seule étoile : le clocher de l’église de Thervay, visible au loin, mince trait dressé vers le ciel. C’est désormais l’horizon qui aimante la marche.
Enfin, après cette longue traversée, les premières maisons de Thervay apparaissent, modestes et discrètes, dissimulées derrière leurs frondaisons. La route semble, comme soulagée, se réfugier dans ce repli d’humanité.

Vous revoici au bord de l’Oignon. Ici, les hommes ont choisi de restaurer une frayère, pour que la rivière retrouve sa mémoire de fécondité. Dans ses eaux claires, les poissons viennent déposer leurs œufs, perpétuant un cycle immémorial, fragile mais vital.

La route tourne à droite, ignorant la piste cyclable, fidèle cette fois à la coquille. Elle traverse un sous-bois dont l’ombre dense rafraîchit soudain le pas.
Puis la route s’ouvre de nouveau, quittant le couvert protecteur du bois pour se diriger vers le village. Les maisons se rapprochent, promesse d’une halte. .
À l’entrée de Thervay, le discret ruisseau de Gravellon roucoule, comme un prélude au repos.
Un espace de pique-nique accueille le marcheur. Sous les grands arbres, de lourds bancs de granite brut invitent à s’asseoir. Leur pierre rugueuse garde la mémoire du temps. Ici, on peut prendre le frais, poser son sac, avant que la route ne reparte, tournant à gauche pour pénétrer dans le cœur du village.
La route s’élève alors vers l’église St Martin. Son édifice, tel qu’on le voit aujourd’hui, remonte en partie au XVIIe siècle. Les siècles y ont déposé leurs strates, donnant à ses pierres un relief d’histoire et de ferveur.

Sur la place, une fontaine monumentale s’impose. Son large bassin de pierre abrite trois cygnes de fonte, élégants malgré leur immobilité figée. Édifiée au début du XIXe siècle, elle est classée à l’Inventaire des Monuments Historiques. Elle témoigne de cette époque où l’eau était non seulement une ressource, mais aussi une mise en scène, une parure du village. Non loin d’ici se dressait autrefois le château de Balançon, aujourd’hui en ruines. Au Moyen Âge, il fut l’un des plus puissants châteaux de Bourgogne, mais le parcours ne vous y conduit pas. Il reste seulement le souffle d’un passé prestigieux, qui continue de hanter les alentours

En quittant le village, la route longe peu à peu un petit oratoire dédié à Ste Philomène. Modeste, presque effacé, il n’en est pas moins un signe : rappel qu’ici, chaque carrefour, chaque pierre, porte la marque de la foi. 

Section 2 : On retrouve le train

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Peu après, la route parvient à un carrefour. Là, au milieu des routes qui s’entrecroisent, se dresse une maison isolée, témoin silencieux de ce carrefour des chemins. La coquille, fidèle compagne du marcheur, invite à poursuivre sur la droite, longeant cette bâtisse solitaire qui semble garder le passage.
Et vous voilà rendu à nouveau sur un chemin de terre, long ruban pâle qui se déroule à travers la campagne nue. Pas un arbre pour rompre la ligne de l’horizon : seulement la vastitude de la plaine, où le vent se plaît à courir sans obstacle. C’est un retour à la nudité, à l’épure d’un paysage sans fioriture.
Là-bas, bien loin du chemin, une énorme ferme trône comme une forteresse agricole. Elle domine ces centaines d’hectares de prés, de maïs et de céréales, terres disciplinées par la main de l’homme. Ici, les champs semblent ignorer les oléagineux : la région préfère ses cultures plus classiques, ses silhouettes de blés et de maïs qui dessinent des damiers monotones.
Et déjà, dans le lointain, se profile une petite éminence. Elle signale discrètement, mais sûrement, le passage du train. Comme un rappel que, sous ce paysage apparemment immuable, court la vitesse moderne.
Le parcours devient lancinant. Long, étiré, il met la patience à l’épreuve. Tous les dix minutes, la plaine est traversée par la fulgurance du TGV. On l’entend venir de très loin, comme une rumeur qui enfle, avant que son grondement ne lacère l’air et disparaisse aussitôt. Ce contraste brutal entre l’immobilité du marcheur et la rapidité du train donne au pèlerinage une étrange intensité.
Au sommet de la butte, le chemin franchit la ligne à grande vitesse. Le pont, massif et impersonnel, s’étale largement. C’est toujours saisissant de constater l’espace qu’exige cette infrastructure colossale, simplement pour laisser filer une succession de trains qui passent comme des éclairs.
À la sortie du pont, il faut se laisser guider encore une fois non par la coquille, toujours mal orientée, mais par la flèche qui l’accompagne. C’est elle qui indique la direction à prendre : vers la droite.
Et c’est le retour au chemin de terre. Presque sans fin, presque rectiligne, il déroule son austérité implacable. Ici, le pèlerin n’a d’autre choix que de laisser ses pensées rouler comme des cailloux sous ses pas. Pas d’ombre, pas de refuge, seulement la lumière crue et les cultures : prairies, maïs, céréales, tout se répète. Au loin, un sous-bois se dessine comme une promesse.
Dans ce coin de plaine, les céréales, notamment le blé, se font un peu plus présentes.

Pendant ce temps, dans la plaine, le train poursuit sa course, imperturbable. Une destinée toute tracée, indifférente à la lenteur du marcheur qui l’observe s’éloigner.

Finalement, le chemin caillouteux s’élève doucement, gagnant un peu d’altitude. Le sous-bois se rapproche, comme un havre attendu. 
Le marcheur entre alors dans l’ombre du bois. Ici, tout est familier : une profusion de hêtres et de charmes qui s’enchevêtrent, ponctués de chênes solides et de frênes, avec quelques érables épars. C’est une symphonie de troncs et de feuillages, un monde plus humide, plus secret.
Mais la terre ne s’adoucit pas. Le chemin, jonché de petits calcaires acérés, devient plus rude. Il vire à angle droit et s’élance dans une descente vers la plaine. Et dans le lointain, toujours, gronde la rumeur persistante du train.
À la droite du marcheur, apparaît le village de Brans, posé dans le paysage comme une halte discrète, presque immobile sous son manteau de silence rural.
Un peu plus loin, c’est une grande antenne de télécommunication qui perce le ciel. Immense, métallique, elle touche les nuages comme pour dialoguer avec les vents. Elle jure dans cette campagne, mais elle dit aussi l’époque moderne qui veille jusque sur ces chemins anciens.
La descente, plus pentue, se poursuit. Au bas, le chemin rejoint la départementale D15. Là encore, la coquille et sa flèche guident le pas : il faut tourner à gauche.
La route s’élance alors, d’abord rectiligne comme une flèche, puis plus souple, plus virevoltante. Elle ondule dans la plaine, bordée de prés et de cultures. Le paysage se déploie dans son immensité simple, mais chaque tournant laisse espérer un nouveau détail, une respiration.
Peu à peu, la route se rapproche du village de Brans. En chemin, elle croise la Vèze, ce petit ruisseau discret qui sillonne la contrée de ses eaux tranquilles. Il coule sans bruit, mais il irrigue le paysage d’une douceur humble.
À l’approche du village, les prairies s’animent. Le bétail, paisible, se dresse dans les champs. Ses silhouettes lentes et massives, taches mouvantes dans le vert, accompagnent le marcheur de leur présence bienveillante.

Section 3 : Dans la campagne de Brans avant les sous-bois

Aperçu général des difficultés du parcours : quelques pentes sans grande difficulté.

La route parvient alors à Brans, un village étiré comme un ruban, qui s’étire nonchalamment au fil de la route. Ses maisons de pierre, tantôt modestes, tantôt fières, racontent une histoire ancienne, celle d’une communauté enracinée dans la terre et le temps. Ici, le pas du pèlerin résonne sur le bitume comme un écho familier, accueilli par les regards discrets des façades.
La dame qui tient le gîte, gardienne de l’hospitalité du lieu, possède aussi la clef de l’église. Elle vous confiera avec un sourire que les bancs de l’édifice sont encore numérotés par famille, comme si la mémoire des lignées continuait de régner sur la nef. Prendre place ailleurs que sur son banc serait presque une offense à l’ordre ancien. Quant aux châtelains, maîtres du château voisin, ils occupaient naturellement le premier rang, signe éclatant de leur préséance dans cette hiérarchie villageoise.
Le parcours se détache bientôt du village et reprend sa liberté, suivant la route qui s’éloigne au milieu de la campagne.
La route ondule doucement entre prés et champs de céréales. Tout au long de la route, un ruisseau discret file à vos côtés, mince filet d’eau dont le murmure accompagne vos pas.
Un peu plus loin, la route passe devant la fontaine-lavoir, dite fontaine Bataillé. C’est un site charmant, presque secret, que la nature enveloppe de son écrin. On imagine les femmes d’autrefois, venues ici loin du bourg, battre le linge au rythme de leurs conversations, mêlant la clarté de l’eau au tissu des confidences. Une courte de granite, posée comme un accent, confère au lieu une dimension romantique, comme si le temps lui-même s’y était arrêté.
Le parcours poursuit sa course sur l’asphalte avant de s’ouvrir à un large chemin de terre battue. Ici, les indications se font plus rares, mais la voie est claire : il faut continuer droit devant, porté par l’évidence du chemin.
C’est à nouveau ce chemin de terre typique de la région, semé de petits cailloux tranchants comme des éclats de verre, qui résonnent sous vos semelles. Il se rapproche progressivement de la forêt, comme attiré par une ombre protectrice.

Sur la colline, l’œil du pèlerin capte bientôt la silhouette du clocher d’Offlanges. Sa pointe s’élance dans le ciel, semblant si proche qu’on croirait presque l’atteindre en quelques instants. Mais l’illusion est trompeuse : le parcours réserve encore bien des détours avant de céder son secret.

Le chemin s’adoucit en sinuosités, traversant un bois clairsemé. Les essences familières dominent : frênes, charmes, hêtres, érables dressent leurs troncs en fraternité. Mais parfois surgissent de grands pins, vigies sombres qui contrastent avec la clarté des feuillus, apportant au paysage une note plus austère.
Le chemin s’étire longuement dans cette atmosphère répétitive et tranquille. Parfois, une coquille fixée sur un tronc se présente comme un sourire bienveillant, rappelant au marcheur qu’il est sur la bonne voie. Pourtant, nul risque ici de s’égarer : un seul chemin fend le bois de Brans.
Plus loin, le ruisseau de la Vèze rejoint à nouveau la route, comme un compagnon insistant, fidèle à chaque détour. Ses eaux modestes n’ont rien d’un torrent, mais elles charment par leur constance et leur clarté.
Le chemin joue avec le ruisseau, s’en écartant parfois, revenant à lui comme on revient vers une vieille connaissance. À certains passages, la terre gorgée d’eau se fait traîtresse : même par temps sec, les pas s’enfoncent dans la boue. C’est là une leçon de patience, où chaque enjambée réclame une vigilance accrue.

Enfin, le chemin vire à droite et franchit le cours de la Vèze. Une petite passerelle, simple et modeste, tend son bois ou sa pierre pour permettre le passage. Minuscule ouvrage, mais indispensable, elle marque le triomphe paisible du marcheur sur les obstacles naturels.

Section 4 : La dure montée vers Offlanges

 

Aperçu général des difficultés du parcours : pentes souvent très marquées sur le parcours.

Après avoir franchi le ruisseau, le chemin reste encore un instant dans l’ombre apaisante du bois. L’air y demeure humide, chargé de senteurs de fougères et de terre fraîche. Mais ce répit sylvestre est bref, car déjà la clairière s’annonce et le monde ouvert reprend ses droits.
Bientôt, la pente se fait plus ferme, plus décidée, comme si la colline vous rappelait à l’ordre. Le sol caillouteux laisse place au goudron, et le doux chemin de terre se mue en une route où chaque pas exige davantage d’effort. Le pèlerin sent alors dans ses jambes ce passage de seuil : l’ascension commence véritablement.
Cette route porte un nom plein de justesse : le Chemin de la Serre. Elle se love contre la pente, s’élançant puis se repliant, virevoltant avec légèreté sous la voûte des arbres. On croirait suivre la trace capricieuse d’un ruisseau disparu, tant elle sinue et joue avec la colline. Les frondaisons épaisses l’enveloppent d’une fraîcheur bienfaisante, comme un écrin végétal au cœur de l’effort.
Le long de cette route escarpée, quelques lopins de terre cultivés surgissent çà et là, comme des clairières domestiquées au milieu des bois. De petits champs de blé, modestes mais fiers, se balancent doucement sous le vent, à l’ombre des grands frênes et des pins.
Puis, au détour d’un lacet, les premières maisons du village apparaissent, bien au-dessus. Elles se détachent, minuscules d’abord, comme des promesses de repos.
Au bord de la route, une petite croix de granite, simple et discrète, se dresse comme un signe d’encouragement. Elle rappelle aux voyageurs que chaque ascension est aussi un chemin de foi, une épreuve que d’innombrables pas ont gravie avant vous. La pierre usée par les siècles garde la mémoire silencieuse de toutes ces présences.
Encore un dernier effort, un coup de collier, et l’on atteint enfin les premières maisons d’Offlanges. Le village s’offre à vous, à la fois humble et accueillant, comme une halte promise au pèlerin qui a dompté la pente.
Le Chemin de la Serre se termine au contact de la départementale D243, là où se tient un vieux puits d’un autre âge. Sa margelle usée par le temps raconte les gestes simples des anciens, venus y puiser l’eau fraîche avant que la modernité ne transforme leurs usages.
Offlanges déploie alors son charme discret. Ses maisons de pierre, souvent recouvertes d’un crépi ocre, dessinent des façades aux teintes chaudes. On y lit l’empreinte d’un village ancien, à la fois rude et tendre, enraciné dans sa terre.

Presque au centre du village, l’église se dresse, sobre et massive. Dédiée à Notre-Dame-de-l’Assomption, elle occupait déjà cet emplacement au XIe siècle. Rebâtie entièrement au début du XVIIIe, elle porte dans ses pierres la solennité des siècles et la ferveur de tant de générations. Son allure imposante domine les maisons alentour, comme une mère protectrice qui veille sur ses enfants.

À la sortie du village, le parcours s’engage dans la Rue de la Croisette. Au carrefour, une nouvelle petite croix de pierre accueille le pèlerin, accompagnée d’un banc providentiel : lieu idéal pour reprendre souffle, méditer un instant.
La route s’élance ensuite vers la descente. D’abord droite, elle traverse la campagne sous un rideau d’arbres, ponctuée d’une aire de pique-nique, puis elle passe devant un singulier cimetière à roulottes, étrange cortège immobile qui intrigue et questionne. 
Peu à peu, le pays s’ouvre. Les horizons se dilatent, offrant de larges perspectives sur la plaine et les collines qui s’étendent au loin. C’est une respiration, une invitation à lever les yeux et à se laisser envahir par la grandeur du paysage.
Plus bas, le parcours bifurque pour prendre la direction de Moissey, à un kilomètre et demi de là.
La route traverse les prés et quelques champs de blé. C’est la saison des foins : les tracteurs, véritables monstres d’acier, accomplissent en un seul geste savant ce que jadis des générations faisaient à la force de leurs bras. Ils ramassent, compressent, enrubannent dans une mécanique fluide, qui fascine autant qu’elle éloigne des gestes anciens. La faux de nos aïeux paraît soudain appartenir à une ère révolue, effacée par la modernité.
Encore un peu de descente, et la route rejoint la plaine, s’aplanissant comme une invitation à souffler après les efforts passés.
Tout en bas, elle croise la départementale D37, à hauteur du cimetière de Moissey, silencieux gardien des mémoires.

Et là, surprise rare sur ce chemin aux balises parfois évasives : de véritables panneaux de direction se dressent enfin, clairs et rassurants. Mais le pèlerin sait déjà que ce confort ne durera pas.

Section 5 : Un très mauvais chemin dans les bois

Aperçu général des difficultés du parcours : pentes souvent marquées sur le parcours.

La route arrive alors à l’entrée de Moissey. Le village se déploie lentement devant le pèlerin, comme une scène attendue après la monotonie de la plaine.
Le parcours se faufile ensuite dans les ruelles, petites artères pavées et silencieuses, jusqu’à l’église qui domine la cité. Les pas résonnent contre les murs de pierre, ajoutant un rythme discret à la sérénité du lieu.
L’édifice est perché sur le sommet du coteau, imposant sa silhouette sur le village moderne qui s’étire en contrebas. Consacrée à St Gengoult, martyr oublié du temps, l’église conserve dans son chœur et son sanctuaire des éléments remontant au XVe siècle, témoins silencieux de siècles de dévotion. Ses pierres, légèrement patinées, semblent absorber la lumière comme des lanternes figées dans le temps.

Un panneau très clair annonce aux voyageurs la suite du Chemin de Compostelle : le Ruisseau des Gorges à 800 mètres et le village de Menotey, encore loin, à plus de cinq kilomètres. Il y a quelque chose de rassurant dans cette clarté, un souffle d’orientation dans le labyrinthe du monde.

Le parcours s’aventure ensuite dans un agréable parc jouxtant le château. Les pierres du monument, avec leurs pont-levis et mâchicoulis sculptés par les siècles, évoquent un grand château fort imaginaire. Bien que ruiné au Ve siècle et reconstruit au XVIIIe siècle, il garde l’âme de ses origines. Le chemin descend en contrebas, longeant l’église et le château, pour rejoindre la grande départementale D475. 
Au carrefour bruyant, une fontaine attire l’œil. Monument à la fois lavoir, abreuvoir et fontaine, restauré depuis, il date de la fin du XVIIe siècle et témoigne du quotidien des lavandières d’antan. Une boulangerie-épicerie voisine offre un répit bienvenu, mais le défilé incessant des poids lourds qui descendent des Vosges vers Dole rappelle la vie moderne, impitoyable et pressée.
Le parcours suit un court instant la départementale, avant d’obliquer sur la gauche, empruntant la Rue du Moulin. La transition est douce mais nette, comme un souffle qui vous éloigne du tumulte du carrefour pour retrouver la sérénité des chemins plus étroits.
Cette rue conduit à un centre d’accueil pour chiens et chats, petite parenthèse de vie domestique au milieu de la nature. 
À partir de là, un chemin de terre caillouteux commence sa lente montée vers la forêt. Les pierres crissent sous les pas.

Le chemin arrive bientôt au lieudit Ruisseau des Gorges, annonçant la Meulière à 1.6 km et Menotey à 5.4 km. Ici, le pèlerin sent la transition : le monde civilisé s’éloigne peu à peu, la nature reprend ses droits.

Au départ, tout semble simple : le chemin large suit le ruisseau paisible. Mais l’évidence de la tranquillité est trompeuse. On devine vite que l’on s’enfonce dans une nature plus brute, où chaque pas demande vigilance.
Puis commence une montée sévère de 1.5 km à travers un bois marécageux, sillonné par les vététistes qui ont labouré la terre. Même par temps sec, le sol cède et recule sous vos pieds, transformant chaque pas en un petit combat avec la boue. C’est un des passages les plus éprouvants du Chemin de Compostelle, un sentier qui défie patience et équilibre.
Heureusement, dans ce chaos, la coquille apparaît de temps à autre, même si elle est toujours mal orientée, comme un phare dans la brume, rappelant que le pèlerin n’est pas perdu. Ces marques rassurantes sont des balises dans l’épreuve. 
Autour de vous, la nature est à la fois sauvage et exubérante. Les grands feuillus se dressent, impassibles, tandis que les buissons serrés et les racines tortueuses rythment la marche. Parfois, le sentier s’assèche un instant, mais la boue, compagne fidèle, rappelle constamment la particularité de cette pente.

Lorsque vous atteignez le lieudit La Meulière, c’est un sentiment de délivrance qui s’empare de vous. Vous avez quitté l’enfer du Bois de Grédisan, à deux kilomètres seulement, mais le village de Menotey reste encore à plus de quatre kilomètres. Deux voies mènent au village, mais le pèlerin sait qu’il faudra suivre la coquille, guide fidèle et indispensable.

Le chemin change alors de caractère. Sec, il serpente maintenant sur une crête, royaume de chasse et de vents, où palombières et terriers trahissent l’activité des hommes dans ce territoire. Chaque palombière semble un vigile, observant les voyageurs en silence.
La forêt qui l’entoure devient radieuse. Les rayons de soleil s’infiltrent entre les troncs gigantesques, illuminant les pins, chênes chevelus et hêtres joufflus. Le spectacle est presque théâtral : chaque arbre semble gratter le ciel, chaque ombre danse avec la lumière.
Les coquilles, parfois visibles, signalent subtilement les changements de direction, tandis que les palombières jouent à cache-cache dans cet écrin mystérieux. La nature et l’homme s’y côtoient avec élégance, discrète et respectueuse.
Plus loin, le chemin atteint le lieudit Le Bois des Pères, situé à un kilomètre de la Croix Boyon. La forêt y est dense mais respirante, et le chemin, caillouteux et stable, permet au pèlerin de retrouver un rythme serein après l’épreuve du marécage.

Section 6 : Entre bosquets et campagne

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans difficulté.

Un sentier continue à dodeliner dans le bois magique, balancé entre les coquilles omniprésentes et les palombières. Les pigeons, invisibles mais assurément nombreux, doivent s’ébattre dans les hauteurs. Chaque pas résonne sur la terre humide, mêlant le murmure des feuilles et le cliquetis discret des cailloux.
Ici, la forêt est exploitée avec une douce rigueur ; les hêtres et les charmes, majestueux et imposants, trônent parmi les sous-bois, offrant un abri ombragé et un sentiment de permanence au pèlerin qui traverse ce royaume végétal.
Le sentier finit par déboucher au lieudit Sous la Croix de Boyon. La Croix de Boyon se dresse deux cents mètres plus haut, solitaire et fière, mais le parcours ne s’y aventurera pas. C’est une belle croix de pierre, perdue dans la nature comme une sentinelle oubliée, témoin silencieux des âges.
Le chemin continue à dodeliner dans le bois magique, balancé entre les coquilles omniprésentes et les palombières. Les pigeons, invisibles mais assurément nombreux, doivent s’ébattre dans les hauteurs. Chaque pas résonne sur la terre humide, mêlant le murmure des feuilles et le cliquetis discret des cailloux.
Une longue route rectiligne de terre battue s’étire ensuite dans le bois, descendant pendant plus d’un kilomètre. Cette voie, aussi paisible qu’endurante, traverse un domaine de chasse, ce dont on ne doute guère, au vu des palombières rencontrées plus tôt dans le bois.
Plus bas, le chemin passe au lieudit Le Chemin de la Poste, où se niche un relais de chasseurs, modeste mais fidèle à sa vocation. À deux pas se trouve le hameau de Grédisans, encore invisible à ce stade mais déjà signalé par les traces humaines.
La route croise une croix de pierre et continue de descendre. Toutes les croix ici semblent sorties d’un même moule, compactes et basses, comme si elles avaient été façonnées par une main commune, discrètes mais dignes, rappelant la ferveur des générations passées.
Rapidement, le parcours quitte la route pour retrouver un chemin de terre qui s’enfonce dans un bosquet. 
C’est un joli bosquet sombre où les charmes touffus s’entrelacent, dessinant des couloirs d’ombre ponctués par les rayons du soleil filtrant entre les branches. L’atmosphère y est intime, presque secrète, comme un refuge pour les pensées. 
Quand le chemin quitte le bosquet, les premières maisons de Grédisans apparaissent, nichées dans le vert. Le village semble paisible et accueillant, avec ses maisons paysannes aux toits soignés et à l’âme authentique. 
L’eau potable y est présente, bien que les fontaines soient discrètes et laissent deviner que la vie suit ici un rythme tranquille, à l’abri du tumulte extérieur. 
À la sortie du village, le parcours prend la direction de la Croix Denis. Il passe devant des restes de murailles mystérieuses, vestiges d’un temps où les murs cachaient des secrets et protégeaient des vies oubliées. 
Derrière un banc de pierre brute, sous un tilleul généreux, près de la belle croix de pierre, il est doux de s’arrêter et de respirer. Le chemin s’élève alors le long des murs, gagnant le sommet de la crête, comme pour offrir au pèlerin un panorama sur le monde alentour. 
Le chemin s’aventure alors sur la crête sauvage. Ici, la nature semble souveraine, libre et indomptée. 

Au loin, dans un horizon encore incertain, se dessine la colline du Mont Roland. L’objectif semble proche, mais le voyage continue : la distance reste tangible, le sommet encore à conquérir.

Au bout du chemin, le parcours rejoint la départementale D79 et tourne à droite, suivant les indications de la flèche de la coquille, guide fidèle et parfois ironique dans ses approximations. 
Le parcours du jour alterne entre longues routes et chemins isolés. Ici, le pèlerin chemine sur la route pendant près d’un kilomètre, le regard perdu sur la plaine et les collines lointaines. 
Au sommet d’une légère pente, le voyageur atteint une stèle dite « pierre milliaire ». Son nom est trompeur : longtemps confondue avec une borne romaine, il s’agit en réalité d’une stèle funéraire gallo-romaine du IIe siècle. La reproduction actuelle rend hommage à l’original conservé au Musée archéologique de Lons-le-Saunier. 
Peu après, la route arrive au lieudit Le Faubourg, à deux pas du village de Menotey. Le parcours évite le centre du village, préférant le charme discret des abords, et prend la direction de Jouhe, situé à trois kilomètres d’ici. . 

Section 7 : Avec le Mont Roland devant les yeux

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans difficulté.

Une route désossée s’élance alors sur la crête, musardant entre les herbes folles et les lignes ondulées du paysage. Elle avance sans hâte, comme si elle se laissait porter par le souffle du vent et la respiration tranquille des collines.
Peu après, elle croise une Vierge de pierre, discrète et recueillie, protégée par l’ombre apaisante des marronniers. Dans ce petit parc, la présence silencieuse de la statue invite le pèlerin à un instant de pause, à une pensée intérieure. 
Un large chemin, caillouteux à souhait, commence à monter doucement vers la colline. Non loin d’une antenne solitaire, les vaches paissent en liberté, indifférentes aux pas des voyageurs. 
Du sommet de la crête, le chemin s’adoucit, large et tranquille. Il descend imperceptiblement, rectiligne, moins caillouteux. Autour de lui, les prés nus s’étendent, ouverts sur l’horizon. Devant, presque toujours en ligne de mire, se dresse le clocher de l’église de Mont Roland, silhouette encore lointaine, promesse d’une arrivée lointaine.
Plus bas, le chemin s’enfonce dans un léger sous-bois. Là, le clocher disparaît parfois, comme pour jouer à cache-cache avec le pèlerin, avant de réapparaître plus loin. Le chemin change de visage, tantôt lisse, tantôt piqueté de pierres, rythmé par ce jeu d’ombres et de lumière. 
Au terme de la descente, le chemin enjambe la grande départementale D475, bruyante et familière, déjà croisée à Moissey. Le contraste est frappant entre la sérénité du chemin et le tumulte incessant de la route.
Sitôt après, près d’une croix de granite tapie sous les frondaisons, le chemin oblique doucement, comme guidé par la pierre silencieuse.
De nouveau, il s’échappe dans les prés, serpentant à ciel ouvert. 
Peu à peu, il s’approche de la route, à l’entrée de Jouhe, longeant un parc ombragé où les arbres offrent un abri aux voyageurs.

Vous arrivez alors au lieudit La Grande Corvée, à un kilomètre du centre de Jouhe, et à 3.6 kilomètres seulement du Mont Roland. L’horizon s’approche, mais le pèlerinage garde encore sa part d’effort et de patience.

La route bifurque alors à gauche, suivant la route de Gray. Elle longe le parc et progresse lentement vers le cœur du village, comme hésitant à pénétrer dans son intimité.
Un peu plus loin, le parcours tourne à droite et descend doucement jusqu’au centre.
La route traverse la place de l’église St Pierre, un édifice marqué par les siècles et les transformations. Longtemps rattachée au couvent du Mont Roland, cette église garde l’empreinte du temps, témoin de l’histoire spirituelle des lieux. 
À la sortie du village, la route franchit de nouveau la Vèze, ce petit cours d’eau compagnon de route, aperçu tant de fois ces derniers jours. Ici, le site est charmant, où l’eau claire s’accorde à la sérénité des arbres qui l’accompagnent.

Section 8 : En route pour le Mont Roland

Aperçu général des difficultés du parcours : parfois quelques pentes rudes.

Le parcours quitte alors l’axe routier pour s’échapper à droite. Une petite route, comme timide, s’élève et s’efface rapidement devant un chemin qui s’élance vers les hauteurs. C’est le Chemin du Mont, qui prend ici des allures d’invitation solennelle. Le pèlerin sent déjà qu’il pénètre dans une autre dimension : celle de l’attente et de l’approche, celle des pas qui s’accordent avec l’espérance. Chaque pierre, chaque touffe d’herbe au bord du sentier semble annoncer l’ascension à venir. 
C’est alors un large chemin qui monte en pente douce sous les frondaisons. La voûte des arbres s’ouvre et se referme, telle une nef sylvestre où la lumière joue comme à travers des vitraux mouvants.
Au sommet de la première montée, le chemin rejoint une petite route goudronnée. La transition surprend : après l’intimité des bois, l’asphalte apparaît comme une ligne dure, une cicatrice humaine posée au milieu de la nature. Mais elle n’est qu’un passage, un trait d’union obligé.
Cette route permet de franchir l’autoroute A36, que vous retrouverez demain sur le parcours. Ici, le contraste est brutal : la rumeur incessante des moteurs rompt la paix du chemin. Pourtant, de ce tumulte mécanique, le pèlerin ne retient qu’un écho lointain, comme un rappel de la modernité dont il s’est volontairement éloigné. Le pont devient alors un seuil : derrière soi, le monde affairé ; devant, la montée vers le sacré.

Vous êtes au lieudit Le Pont Vert. De là, certains pèlerins peuvent céder à la tentation de gagner directement Sampans, évitant ainsi l’ascension du Mont Roland. Mais c’est se priver d’une étape essentielle, c’est tourner le dos à une expérience intérieure. Escamoter le Mont Roland, c’est renoncer à la rencontre. Pourtant, il en est toujours qui préfèrent raccourcir le temps, comme si le chemin n’était qu’un obstacle. Pour d’autres, au contraire, la lenteur est l’essence même du pèlerinage.

La terre battue reprend alors ses droits. Le goudron s’efface, et le large chemin reprend sa montée raisonnable vers les hauteurs, bordé de haies épaisses où s’entrelacent les feuillus. La marche retrouve son naturel, son rythme ancien.
La montée, un peu longue et dépourvue d’ombre, finit par lasser. Mais l’horizon se dégage bientôt : une carrière ouverte au bord du chemin rappelle que la terre aussi est mise en coupe, extraite, travaillée. Vous voici parvenu au Carrefour de Jouhe. À seulement 1,4 km du Mont Roland, l’étape finale se fait pressentir, comme un sommet attendu derrière la dernière colline.
Le parcours s’enfonce alors dans un sentier étroit qui replonge dans le bois. La lumière baisse, l’espace se resserre, et la marche se fait plus intime. C’est comme si le pèlerin devait franchir un ultime couloir de verdure avant d’atteindre la clarté.
Ici, rien d’inédit, et pourtant tout demeure accueillant : les hêtres, innombrables, dressent leurs troncs droits comme des colonnes ; les charmes étendent leurs ramures serrées ; quelques jeunes chênes, obstinés, pointent vers la lumière. Des érables complètent cette architecture vivante. Le sous-bois respire une familiarité apaisante, mais jamais monotone.
C’est toujours la même forêt, à la fois douce et mystérieuse, comme une compagne fidèle. L’ascension n’a rien de pénible : elle se vit comme une promenade intérieure, un cheminement de l’âme autant que du corps.

Plus haut, le sentier atteint le Carrefour de Saint-Jacques. Le nom seul est une promesse, un signe. À 700 mètres seulement du sanctuaire, le pèlerin sait qu’il touche à l’accomplissement du jour.

 

Encore un détour dans le sous-bois, au long des broussailles serrées, comme si la forêt voulait retenir le marcheur avant de le laisser partir. Puis soudain, l’espace s’ouvre : le sentier débouche sur un large chemin, dans une clairière où la lumière explose. Le Mont Roland est là, presque à portée de main.
Alors les efforts de la journée se dissipent, balayés par la joie de l’approche. Le chemin, apaisé, contourne les arbres. Sur le bas-côté, une Vierge Noire accueille le pèlerin. Drapée dans ses habits de bois sombre, elle veille, discrète et émouvante. Ses traits semblent taillés pour dire la fidélité et la patience, comme si elle portait depuis toujours les prières de ceux qui passent.
La promenade fait le tour du mur d’enceinte du monastère.
Le monastère est situé sur une grande place près d’un grand parc. Il y règne une atmosphère pleine de spiritualité, car l’endroit est un grand site de pèlerinage.
Une chapelle aurait d’abord été fondée au IVe siècle par St Martin, puis un monastère au VIIIe siècle par Roland, neveu de Charlemagne, d’où le nom Mont-Roland. Mentionné officiellement en 1089 dans une bulle papale, il était rattaché au prieuré de Jouhe. Pillé au XIVe siècle, il fut reconstruit et la chapelle devint une église. Plus tard, les jésuites et les bénédictins s’y installèrent. A la révolution, les bénédictins furent chassés et l’église devint un bien national. Les pierres furent vendues. Le sanctuaire renaquit en 1843 par son rachat par les jésuites. La construction dura tout un siècle. Au début du XXe siècle, faute de moyens, les jésuites furent expulsés de la région. Mais par aide financière, ils purent revenir jusqu’en 1961. Au départ des Jésuites, l’administration du sanctuaire de Notre-Dame de Mont-Roland revient au diocèse de St Claude.
Le sanctuaire de Mont-Roland se compose de l’église dédiée à Notre-Dame (1851–1870), où se déroulent, outre les offices des pèlerinages, de plusieurs hébergements et l’hôtellerie, pour accueillir les pèlerins itinérants ou les pèlerinages.

Au bout du long préau, un magnifique hôtel, très fréquenté permet de trouver le repos mérité après une si longue étape.

Logements officiels sur le parcours de la Suisse et l’Allemagne à Cluny /Le Puy-en-Velay

 

  • Gîte Aubriot, 8 Rue du Puits, Offlanges ; 03 84 70 25 64 ; Gîte
  • De Pierre et de Lumière, 5 Rue de la Platière, Jouhe ; 06 31 10 93 79 ; Gîte et chambre d’hôte
  • Hôtel Restaurant Le Chalet, Mont-Roland; 03 84 72 04 55 ; Hôtel

Accueils jacquaires (voir introduction)

  • Thervay (1)
  • Brans (1)
  • Mont Roland (1)

 

Airbnb

  • Thervay 2)
  • Offlanges (1)
  • Moissey (3)
  • Jouhe (1)

Chaque année, le chemin évolue. Certains hébergements disparaissent, d’autres apparaissent. Il est donc impossible d’en dresser une liste définitive. Celle-ci ne comprend que les logements situés sur l’itinéraire ou à moins d’un kilomètre. Pour des informations plus détaillées, le guide Chemins de Compostelle en Rhône-Alpes, publié par l’Association des Amis de Compostelle, reste la référence. On y trouve aussi les adresses utiles des bars, restaurants et boulangeries qui jalonnent le parcours. Dans cette étape, il ne devrait pas y avoir de grands problèmes pour se loger. Il faut le dire : la région n’est pas touristique. Elle offre d’autres richesses, mais pas l’abondance des infrastructures. Aujourd’hui, airbnb est devenu une nouvelle référence touristique, que nous ne pouvons ignorer. C’est devenu la source la plus importante de logements dans toutes les régions, même les régions touristiques peu favorisées. Comme vous le savez, les adresses ne sont pas disponibles directement. Il est toujours vivement conseillé de réserver à l’avance. Un lit trouvé au dernier moment est parfois un coup de chance ; mieux vaut ne pas s’y fier tous les jours. Renseignez-vous, lors de vos réservations des possibilités de repas ou de petit déjeuner.

N’hésitez pas à ajouter des commentaires. C’est souvent ainsi que l’on monte dans la hiérarchie de Google, et que de plus nombreux pèlerins auront accès au site.
Etape suivante : Etape 12: Mont Roland à St Jean-de-Losne

 

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