10 : Auberives-sur-Varèze à St Julien Molin-Molette

Du Rhône vers les contreforts de la montagne du Pilat

Aujourd’hui, vous allez d’abord poursuivre votre voyage à travers la vaste plaine de la Bièvre-Valloire, que vous avez suivie depuis tant de jours, pour enfin atteindre le majestueux Rhône à Chavanay. À partir de ce point, le paysage se transforme radicalement. Vous quittez le département de l’Isère pour pénétrer dans celui de la Loire. Adieu la plaine, bonjour aux collines, et même aux petites montagnes et aux puys, qui vous guident vers le Puy-en-Velay. D’ici quatre à cinq jours, vous aurez rejoint Le Puy, ce point de départ emblématique que tant de pèlerins, principalement des Européens et des Français, considèrent comme le véritable commencement du Chemin de Compostelle. Une vision simpliste, n’est-ce pas, cette idée si franchouillarde que la France est le centre de l’univers ? Pourtant, les chiffres parlent d’eux-mêmes : en moyenne, 150 pèlerins partent chaque jour du Puy, tandis que parfois 3 000 parviennent à Santiago en Espagne. Alors ?

Dans l’art de la construction, le souci de la proximité a toujours prévalu pour le choix des pierres. Si ce choix était restreint en Isère, comme nous l’avons observé, le Pilat et la Haute-Loire reposent sur des socles granitiques et volcaniques, et plus on s’approche du Puy-en-Velay, plus la densité des roches volcaniques s’accroît. Des éboulis aux carrières, on a directement puisé les matériaux de construction. Ici, granites, gneiss et schistes affleurent, avec même quelques roches volcaniques comme les phonolites grisâtres, les trachytes clairs, qui de loin ressemblent à du calcaire, ou encore les basaltes noirs. Les lauzes, ces dalles plates parfaites pour les toits, sont souvent issues de phonolite volcanique, aisément débitables. Le patrimoine architectural de cette région est exceptionnel, avec des demeures anciennes et récentes qui témoignent de l’abondance de matériaux locaux. Les nouvelles constructions, semblables à des parasites, sont rares ici. Les pierres de taille granitiques confèrent aux façades une élégance soignée. Dans cette région, les constructions anciennes se distinguent par la grande régularité des blocs de granit, souvent gris. Les murs en granit sont généralement liés par un enduit à la chaux. Quand les toits ne sont pas en lauzes, souvent de phonolite volcanique, on trouve des tuiles rouges.

Nous avons divisé l’itinéraire en plusieurs sections, pour faciliter la visibilité. Pour chaque tronçon, les cartes donnent l’itinéraire, les pentes trouvées sur l’itinéraire et l’état du GR65. Les itinéraires ont été conçus sur la plateforme “Wikilocs”. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’avoir des cartes détaillées dans votre poche ou votre sac. Si vous avez un téléphone mobile ou une tablette, vous pouvez facilement suivre l’itinéraire en direct.

Pour ce chemin, voici le lien :

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/de-auberives-sur-vareze-a-st-julien-molin-molette-par-le-gr65-73677546

Difficulté du parcours : La journée vous réserve des dénivelés (+710 mètres / -361 mètres) qui, bien que modestes sur le papier pour une étape de près de 28 kilomètres, ne doivent pas être sous-estimés. Les dix premiers kilomètres sont plats, mais ensuite, les 710 mètres de montée se concentrent sur 15 kilomètres, avec un chemin qui grimpe presque constamment avant de redescendre vers Saint-Julien-Molin-Molette. Deux segments sont particulièrement raides, avec des pentes dépassant les 15 % : la montée de La Ribaudy, peu après Chavanay, et surtout le très exigeant col de Sainte Blandine à la fin de l’étape. La descente sur Saint-Julien-Molin-Molette demande également toute votre attention.

État du GR65 : Aujourd’hui, vous marcherez principalement sur des chemins plutôt que sur le goudron, une promesse de meilleure communion avec la nature.

  • Goudron : 12.7 km
  • Chemins : 15.2 km

Ce n’est évidemment pas le cas pour tous les pèlerins d’être à l’aise avec la lecture des GPS et des cheminements sur un portable, et il y a encore de nombreux endroits sans connexion Internet. De ce fait, vous trouvez sur Amazon un livre qui traite de ce parcours.

 

 

 

  

Si vous ne voulez que consulter les logements de l’étape, allez directement au bas de la page.

Parfois, pour des raisons de logistique ou de possibilités de logement, ces étapes mélangent des parcours opérés des jours différents, ayant passé plusieurs fois sur sur ces parcours. Dès lors, les ciels, la pluie, ou les saisons peuvent varier. Mais, généralement ce n’est pas le cas, et en fait cela ne change rien à la description du parcours.

Il est très difficile de spécifier avec certitude les pentes des itinéraires, quel que soit le système que vous utilisez.

Pour les “vrais dénivelés ”et pour les passionnés de véritables défis altimétriques, consultez attentivement les informations sur le kilométrage au début du guide.

Section 1 : Deux gros bourgs pas si éloignés du Rhône

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans difficulté.

Que vous ayez passé la nuit à Auberives, ou que vous ayez simplement transité en empruntant le chemin des Vignes ou en remontant la RN7, vous finirez par atteindre un rond-point à la sortie de la localité, marqué par la présence imposante d’un pressoir, témoin silencieux de la tradition viticole de la région. Ce carrefour est le point de départ essentiel pour s’engager sur le bon itinéraire, une route qui vous dévoilera la beauté discrète et authentique des paysages environnants.

À ce point, vous êtes à la fin de la Route du Château d’Eau, à l’intersection du Chemin de la Pêche. La transition de la ville vers la campagne commence ici, où les premières touches de verdure remplacent progressivement le béton urbain.

La route s’éloigne alors doucement des limites d’Auberives, pénétrant dans un territoire fertile et généreux. Les vergers s’étendent à perte de vue, leur richesse naturelle nourrie par une terre propice aux cultures diverses. Les premiers arbres apparaissent, annonçant les vergers abondants qui caractérisent cette région.

Vous traverserez une vaste étendue de vergers, où abricotiers, pêchers, cerisiers et pommiers prospèrent sous le soleil. Ces vergers sont parés de filets de protection, s’érigeant comme des sentinelles pour préserver les fruits des assauts des oiseaux et des intempéries, en particulier de la grêle qui peut être dévastatrice.

Alors, la route quitte définitivement la banlieue d’Auberives, s’enfonçant davantage dans le monde rural, où la nature règne en maître. Les contours urbains s’effacent, remplacés par un paysage agricole.

Peu après, le GR65 abandonne le bitume pour se transformer en un large chemin de terre qui serpente à travers les vergers. Les arbres, parfaitement alignés comme dans une armée disciplinée, forment un tunnel de verdure et de vie. Ce chemin de terre, humble mais robuste, devient le fil conducteur d’une exploration rurale, une plongée au cœur de l’authenticité d’un terroir généreux.

C’est ici, au cœur de ce labyrinthe verdoyant, que le chemin s’ouvre brièvement, s’engouffrant dans l’obscurité d’un sous-bois avant de retrouver la lumière éclatante.

Après avoir longé le sous-bois, le chemin retrouve les vergers, avant de rejoindre une petite route à proximité de Clonas-sur-Varèze. 

Parmi les vergers omniprésents où pendent les beaux fruits en saison, la route s’élève rapidement vers les hauteurs de Clonas.  

Le GR65 s’éloigne de nouveau de la route pour s’aventurer à travers les prés, offrant une vue sur des demeures tranquilles nichées derrière leurs haies protectrices, dominant le bourg endormi.

Un petit passage sur le goudron, et le GR65 descend doucement du sommet de la colline, appelé le Chemin de la Côte, une voie bordée par la protection bienveillante des majestueux érables, des châtaigniers greffés aux formes élancées, et des chênes centenaires au feuillage dense. Chaque pas résonne sous les voûtes naturelles de ces arbres imposants, leurs branches s’étendant gracieusement au-dessus e vous comme les bras accueillants d’un géant bienveillant, offrant ombre et fraîcheur aux marcheurs.

En descendant vers le centre du village, la silhouette de l’église se découpe contre le ciel, signalant l’arrivée au bas du Chemin de la Côte. Cette rue, méritant pleinement son appellation, s’ouvre comme un passage entre deux mondes : d’un côté, le calme solennel de la campagne et l’agitation discrète du bourg.

Clonas-sur-Varèze, nichée paisiblement au creux de la vallée, révèle ses charmes discrets à ceux qui prennent le temps de s’y attarder. Avec ses 1’500 âmes, cette bourgade se distingue par ses maisons de galets de la Bièvre, témoins silencieux d’une époque révolue. Bientôt, ces constructions traditionnelles s’estomperont dans le paysage, laissant place à un autre type de constructions, faites de pierres de taille. 

Ici, au musée de la Villa Lucinius, les mosaïques romaines racontent des récits séculaires. Si vous y voyez de l’intérêt et que vous êtes dans les bons jours et les bonnes heures d’ouverture, faites-y un passage. C’est aussi ici que de certains pèlerins qui n’ont pas trouvé refuge plus avant sur le parcours, passent la nuit.

Le GR65 quitte alors Clonas en descendant la Route de la Varèze. C’est tout de même un paradoxe. Les deux dernières localité traversée, Auberives et Clonas portent le nom de la rivière, mais nous ne verrez pas la rivière. Elle passe un peu plus haut, au nord pour se jeter dans le Rhône.

Section 2 : Retour sans caractère vers le Rhône

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans grande difficulté.

Depuis Genève, la Via Gebennensis a longtemps serpenté à travers une nature douce, ne croisant que de modestes villages et de petits bourgs. Mais ici, le paysage change brusquement. Pendant longtemps, le parcours traversera une zone semi-industrielle et semi-urbaine avant de retrouver enfin l’air pur, une fois franchi le Rhône. Bien sûr, ce n’est pas une traversée des banlieues de Lyon ou de Paris, mais cela laisse une marque indélébile sur le paysage et sur le pèlerin. Ce sont 4 kilomètres d’ennui total !

À la sortie de Clonas-sur-Varèze, la route s’aventure brièvement à travers la campagne avant de rejoindre la D4, une route départementale animée par le flux incessant des véhicules. À un carrefour, où s’alignent des activités commerciales et industrielles, le GR65 poursuit son chemin.

De l’autre côté du carrefour, le parcours emprunte pour quelques centaines de mètres la route de la Gare. Ironie du sort, aucun train ne s’arrête ici. Trouver un horaire de train pour traverser cette région relève de l’impossible. Ce n’est pas le TGV reliant Lyon à Valence qui passe ici, seulement le TER reliant Lyon à Marseille.  Dans ces petits bourgs, seuls le bus ou la voiture sont des moyens de traversée viables. Quelle ironie pour la France !  

Le GR65 se plie à des détours pour éviter la gare fantôme. On vous l’avait bien dit : vous ne trouverez pas de gare ici. C’est plutôt un sentier muletier caillouteux qui s’élance à travers les prairies, rejoignant finalement après une courter butte une autre route départementale, la D37b, moins fréquentée que la précédente. 

Le GR65 suit alors le bas-côté de cette route, passant sous la ligne TER Lyon-Marseille avant d’atteindre l’entrée de Saint-Pierre. Cette traversée jusqu’au Rhône s’apparente à un véritable parcours du combattant, qui ne manquera pas de laisser une impression marquante sur le randonneur solitaire, peu habitué à cette lutte avec l’urbanité.

À cet endroit, le GR65 abandonne la route principale pour emprunter une petite voie traversant Saint-Pierre et se dirigeant vers Saint-Alban-du-Rhône, une localité dominée par la présence imposante d’une centrale nucléaire. Les environs ne brillent pas par leur intérêt pittoresque : le parcours serpente entre des routes monotones, offrant des vues fugaces sur des maisons sans caractère particulier, souvent dissimulées derrière des haies de thuyas.

Pour essayer de combler ce vide, une halte près d’un parc où trône un ancien pressoir offre un moment de respiration. La route descend ensuite vers un pont. 

Ce pont enjambe la D37b, prête à franchir le Rhône en direction de Chavanay. À côté, une voie de chemin de fer probablement abandonnée accompagne le triste paysage. 

Après avoir traversé ce pont, la route continue à travers la périphérie de Saint-Alban, empruntant le Chemin du Ranch. 

Bientôt, à travers les champs, la silhouette clinquante de la centrale nucléaire apparaît, dominant l’horizon de son architecture industrielle.

À la sortie du village, où l’ennui semble être roi, des rangées de villas sans âme s’alignent, dépourvues de toute activité commerciale. Une épingle conduit le GR65 en contrebas dans la plaine, vers la route du Vieux Pont.

La route se déploie ensuite dans la plaine, entourée de champs de maïs et traversée par une ligne à haute tension. Bien que dépourvue d’élégance, elle représente néanmoins une retrouvaille avec la nature pour le pèlerin. Ce dernier ne peut toujours prétendre à l’extraordinaire ou au sublime.

Peu après, au croisement, la route du Vieux Pont rejoint une fois de plus la D37b.

À cet endroit, un étroit sentier serpente le long de la route jusqu’à finalement atteindre les rives du Rhône. Vous êtes presque sorti de ce passage éprouvant, du cauchemar pour certains.

Section 3 : Après le Rhône, le GR65 commence à grimper

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans difficulté jusqu’à Chavanay, puis montée exigeante vers la Ribaudy, avec parfois des pentes à près de 20%.

Le chemin et la route convergent alors vers le grand pont qui enjambe majestueusement le Rhône.

Sous ce pont, le Rhône s’étend majestueusement, serpentant au pied des coteaux où les terrasses des vignobles dominent la rivière. C’est ici, sur ces pentes vertigineuses, que prospèrent avec bonheur la syrah et le viognier des Côtes Rôties et du Condrieu, parmi les plus grands vins de la planète, qu’ils soient rouges ou blancs. Quel bonheur pour les amateurs de vin ! Hélas, le parcours ne passera pas par ces beaux vignobles. Depuis votre dernière rencontre avec le fleuve à Yenne, le Rhône s’est considérablement gonflé. En chemin, il a englouti l’Ain, la Saône et quelques autres ruisseaux plus modestes. Il lui manque encore l’Isère, la Drôme, la Durance, la Cèze et l’Ardèche pour étancher un peu plus sa soif. 

Plus bas, presque au bord de l’eau, la centrale nucléaire se tient paisiblement. Bien que les tsunamis soient rares en France, un incident majeur tel qu’un séisme pourrait entraîner une contamination prolongée du territoire jusqu’à la Méditerranée.

À la fin du pont, le GR65 arrive à un carrefour orné d’un rond-point fleuri, qu’il contourne en s’échappant vers une petite route industrielle. 

Peu après, le GR65 se faufile sous un petit tunnel désormais silencieux, autrefois traversé par des trains de voyageurs qui ont cessé de circuler dans les années 70. Un témoignage poignant de l’évolution du paysage ferroviaire français, où même sur la rive droite du Rhône, une région autrefois animée, le silence des rails prédomine. L’absence de trains se fait sentir jusqu’en Ardèche voisine, laissant les voyageurs se débrouiller par d’autres moyens. Triste constat pour une nation qui fut jadis à la pointe du réseau ferroviaire européen. Ici, il n’y a plus que les trains de marchandises qui passent. 

Cependant, cette route contournée depuis le pont a pour but de vous préserver de la N86, la célèbre route des vins qui serpente de Vienne à Valence, en passant par des terres viticoles réputées comme Tournon et Tain-l’Hermitage. Chaque kilomètre de cette route évoque l’excellence des grands crus, célébrés et dégustés à travers le monde pour leur richesse et leur caractère.

Sous la voie sinueuse de la N86 coule paisiblement la Valencize, une petite rivière qui accompagne le GR65 dans son cheminement, au rythme calme des eaux murmureuses. 

Un peu plus loin, le chemin traverse un parc enchanteur, où l’ombre des grands arbres invite à la détente. Le ruisseau voisin, avec son murmure cristallin, semble narrer une histoire paisible et intemporelle, comme une promenade de bonheur au cœur de la nature préservée.

À la sortie du parc, vous découvrez le Square du 11 Novembre et les magnifiques remparts tortueux de Chavanay. Ce bourg est marqué par son passé défensif, avec d’anciens remparts qui encerclent encore les constructions denses et les rues étroites. La plupart des rues sont pavées et semi-piétonnes, certaines suivant même la trace des anciens remparts datant du XIVe siècle, érigés lorsque Renaud de Forez transforma Chavanay en place forte. Non loin de là se dresse l’église Sainte-Agathe, dont les origines remontent au Xe siècle, restaurée au VIIe siècle. Témoin de l’histoire tourmentée de la région, elle servit même de grenier pendant la Révolution avant de retrouver sa vocation religieuse. Récemment restaurée, elle incarne la pérennité et la foi des habitants de Chavanay.  

Chavanay, avec ses 3’000 habitants, conserve son charme d’origine gallo-romaine, enrichi au Moyen Âge par une seigneurie. La ville a su préserver son organisation circulaire, ses tours en ruines et ses ruelles sinueuses, toutes bordées de demeures en pierre taillée. De nombreux pèlerins y font halte, attirés par la quiétude et la disponibilité des commerces ainsi que des logements. Notamment, près de l’église, la rue du Pèlerin accueille un gîte dédié aux pèlerins.

Le GR65 quitte la localité en franchissant les fortifications près de la Maison de la Tour. Cette bâtisse ancienne, voisine du bassin de la Serve, témoigne d’un passé où elle alimentait autrefois une propriété agricole le long des berges de la Valencize. Aujourd’hui, le bassin a été aménagé pour accueillir des joutes nautiques, offrant un cadre pittoresque aux visiteurs. La tour, dont l’origine demeure mystérieuse, faisait autrefois partie d’un avant-poste stratégique protégeant les remparts de Chavanay. Ici, le GR65 traverse la Valencize, un ruisseau paisible perdu dans la végétation dense au fond du vallon.

Une route serpente alors au-dessus du bourg, offrant rapidement une vue contrastée entre les maisons plus cossues de la Loire et celles de l’Isère. Ici, les pierres taillées refont leur apparition, témoignant de l’architecture locale traditionnelles.

Le GR65 suit cette route jusqu’à atteindre la bifurcation menant à la Chapelle du Calvaire.

Un sentier rocailleux, parfois parsemé de gros cailloux anguleux, s’élève à travers un sous-bois de feuillus. La pente abrupte, souvent supérieure à 20%, est ombragée par une dense collection de châtaigniers, avec la présence plus discrète de frênes, de chênes et de hêtres.

Plus haut, la pente s’adoucit, un soulagement pour tous sauf les athlètes endurcis. Le chemin oscille entre la terre labourée jonchée de pierres imposantes et la douceur de la mousse, au milieu d’une végétation luxuriante.

Enfin, le chemin atteint presque à plat la Chapelle du Calvaire. Cet édifice possède une riche histoire : sa construction débuta en 1724 sur un terrain appartenant à la confrérie des Pénitents Blancs, fondée à la fin du XVe siècle. Après la dissolution de la confrérie en 1777, la chapelle fut abandonnée puis restaurée à la fin du XIXe siècle par une confrérie réformée. Elle servait autrefois de lieu de pèlerinage avec des messes bisannuelles et marquait la fin du chemin de croix le Jeudi Saint. Après la disparition de cette confrérie en 1892, la chapelle tomba une nouvelle fois dans l’oubli jusqu’à sa rénovation de 2000 à 2003, grâce aux efforts de l’association “Amis de la Chapelle du Calvaire” et au soutien de fonds publics et privés.

De la chapelle, la vue plongeante sur Chavanay et le Rhône s’offre aux regards des pèlerins. Pour beaucoup d’entre eux, ce moment marque un adieu empreint de nostalgie au fleuve qui les a accompagnés pendant près de dix jours depuis Genève.

Après avoir quitté la Chapelle du Calvaire, le chemin reprend son ascension ardue à travers un chemin accidenté entre lande et sous-bois. Les chênes et les châtaigniers s’épanouissent sur ces terrains pauvres et caillouteux, trouvant leur nourriture dans la rudesse du sol.

Plus haut, les premières vignes émergent le long du chemin cahoteux, marquant le début d’une montée continue à travers les vignobles. Bien que les cailloux se fassent moins présents, la pente reste soutenue au milieu des rangs de vignes qi se multiplient progressivement.

Condrieu n’est pas loin, sur une autre colline voisine. Cette région est renommée pour son vin blanc élaboré à partir du célèbre cépage viognier, ainsi que pour son vin rouge à base de syrah, proche des appellations Saint-Joseph et Côte-Rôtie. Ici, ce sont les mêmes cépages, mais non les mêmes vins, et les mêmes prix élevés. Les sols ici sont principalement composés de calcaire et de schistes, loin du granit et des roches volcaniques de ses voisines plus réputées. Cela peut-il expliquer la différence de réputation viticole ? Peut-être, mais personne ne sait ouvrir scientifiquement la clef des grands crus. 

Au sommet de la crête, le chemin de terre, large et caillouteux, rejoint une petite route qui serpente jusqu’au hameau de La Ribaudy. 

C’est ici, sur cette crête, qu’un dernier regard empreint de douceur et de gratitude est offert au Rhône et au magnifique vignoble qui, tel un gardien silencieux, veille sur le fleuve majestueux.

La Ribaudy déborde de charme avec ses superbes maisons de pierre à l’architecture soignée et aux joints impeccables. Chaque bâtisse respire l’histoire des vignobles, et l’on devine à travers leurs portes l’entrée discrète des caves, où le précieux nectar est choyé et affiné.

Même après avoir quitté le Rhône, les vignes persistent ici, étendant leurs rangs ordonnés autour du hameau. À la sortie de La Ribaudy, un chemin amorce une descente douce dans un petit vallon tapissé de vignes. Ce sol typique des terrasses calcaires est parsemé de grosses pierres calacaires, enchâssées dans une terre douce et limoneuse. De l’autre côté du vallon, les jardins fruitiers s’étirent, offrant un autre tableau paisible.

Les vignes ici sont étagées en terrasses, délimitées par des murets de calcaire, de granite et de schistes. Le sol de la région est un doux mélange de ces pierres, reposant sur une base de gneiss, de granite et de schistes provenant du massif du Pilat, enrichi plus tard par les alluvions calcaires charriés par les glaciers.  Le chemin descend alors en pente soutenue vers un sous-bois. 

La descente dans ce sous-bois, où s’élèvent avec grâce et volupté de grands feuillus, est courte mais immersive. Ces arbres majestueux, que vous avez appris à apprécier dans la région, vous accompagnent jusqu’au petit ruisseau de Mornieux. Ce ruisseau, modeste et secret, serpente paisiblement dans le dense vallon forêt.

Depuis le ruisseau, le chemin, assez caillouteux, remonte en pente douce à travers le sous-bois et sa nature sauvage, menant à un petit plateau.

Section 4 : Dans les sous-bois, les vignes et les vergers

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours avec parfois quelques pentes un peu plus rudes.

À la sortie de la dense forêt, le chemin s’étend jusqu’au lieu-dit La Grange du Merle. Dans cette région, les panneaux de signalisation en bois arborent une touche unique, un charme rustique et pittoresque, écho du passé et témoin silencieux des époques révolues. On se sent immédiatement transporté dans un autre temps, une autre vie, où la modernité semble avoir pris congé pour laisser place à la quiétude et à la simplicité champêtre. 

Dès cet instant, les vergers, principalement composés de pommiers, alignés avec une précision presque militaire, commencent à rivaliser avec les vignobles pour s’approprier le paysage. Chaque arbre, semblable à un petit soldat obéissant, ajoute à l’harmonie de la scène. 

Le sol, de plus en plus moelleux sous les pas, offre une sensation de douceur et de tendresse, semblable à celle d’un tapis de mousse. De modestes guérites, construites de gros blocs de pierre, se dressent çà et là, telles des signatures distinctives de nombreux vignobles à travers le monde. Ces abris rustiques, solides et imposants, racontent des histoires de protection contre les intempéries et d’abri pour les outils.

Plus loin, le chemin, toujours hésitant entre les cailloux qui se glissent insidieusement dans les semelles et la terre sablonneuse qui adoucit les pas, atteint finalement l’extrémité du plateau. Là, il traverse Morzelas, un village empreint de l’âme des vignerons et des cultivateurs. Les maisons en pierre, avec leurs toits de tuiles rouges, semblent presque fusionner avec le paysage, tandis que les vignobles et les champs cultivés témoignent de l’harmonie entre l’homme et la nature.

En montant, le chemin adopte une pente douce, serpentant à travers une lande en apparence désordonnée, un chaos harmonieux où les vergers et les vignes se mêlent dans une anarchie bucolique. Ici, la nature règne en maître, chaque plante trouvant sa place dans un équilibre précaire mais magnifique. Ce voyage, à travers ce tableau vivant, est une ode à la sérénité et à la beauté simple et authentique de la campagne. Les paysages, bien que parfois rudes et imparfaits, portent en eux la magie indéfinissable de la vie rurale, où chaque élément contribue à un tout harmonieux et enchanteur. 

Quand le chemin atteint le lieu-dit Les Combes, vous arrivez sur un petit plateau qui offre une vue imprenable sur la région environnante. Ici, il est essentiel de souligner la précision et l’attention portée à la signalisation du chemin, chaque détail étant soigneusement marqué pour guider le voyageur. Hélas, cette rigueur ne persistera pas tout au long du parcours.

Bientôt, le chemin croise une petite route, puis continue sur la terre battue du haut plateau. L’annonce du Saut de l’Agneau à deux pas d’ici suscite l’anticipation et l’excitation, un nom évocateur qui promet une découverte fascinante.   

Le chemin poursuit son tracé, serpentant entre les vignes et les rares arbres fruitiers qui parsèment le paysage. Devant vous, les toiles blanches et bleues des horticulteurs et des maraîchers se déploient, témoignant de la douceur de cette terre pour la culture. Le calcaire limoneux, léger et fertile, se révèle bien plus propice aux plantations que l’argile lourde et récalcitrante. 

Juste à côté, le chemin passe au lieu-dit Le Saut de l’Agneau, un endroit dont le nom laisse perplexe. On se demande où l’agneau aurait bien pu sauter, peut-être un saut symbolique ou une simple légende locale. Bessey, charmant village à l’âme vigneronne, se trouve à un peu plus de deux kilomètres d’ici, une invitation à prolonger la promenade et à découvrir d’autres trésors cachés de cette région.

Et le chemin s’étire, plat et rectiligne, à travers la plaine monotone, bordée de grandes prairies et de champs cultivés discrets. Ici, il n’y a plus de vignes ni d’arbres fruitiers pour rompre la monotonie. À l’horizon, les monts du Pilat se dessinent avec majesté, tandis que, cachée derrière cette montagne, repose la ville de Saint-Étienne.

La traversée de cette plaine, qui semble infinie dans sa simplicité, s’étend sur plus d’un kilomètre. La nature, presque déserte, confère une atmosphère de solitude sereine. Le chemin commence ensuite à descendre en pente douce vers le ruisseau de Mouling, croisant une ancienne guérite de pierres massives, vestige d’un passé révolu. Cette structure, peut-être en train de s’effacer avec le temps, semble être le témoin silencieux de nombreuses saisons.

Plus loin, le chemin descend doucement dans le sous-bois, offrant une parenthèse de fraîcheur sous l’ombre bienfaisante des grands feuillus. Traverser même un petit filet d’eau avec un cheval demande de la précaution et de l’adresse. La fraîcheur du ruisseau et la densité des feuillages créent un refuge naturel apaisant, une pause bienvenue dans ce voyage.

Le chemin remonte ensuite brièvement de l’autre côté du ruisseau. C’est souvent dans ces sous-bois que les cailloux sont omniprésents, abandonnés par les paysans qui n’ont pas encore dompté cette partie sauvage de la nature. Les chênes et les châtaigniers sauvages y prolifèrent, ajoutant une touche de sauvageonne à ce décor pastoral.

Un large chemin serpente à travers les prés et les vergers en direction du village de Bessey. De temps à autre, de petits bouquets d’arbres, principalement des frênes, ponctuent le paysage. Les arbres fruitiers, dissimulés sous leurs toiles protectrices, refont surface, ajoutant une note de couleur et de vie à ce tableau bucolique.  

Plus loin, le chemin alterne entre la terre douce et les cailloux acérés, créant un contraste saisissant sous les pieds des marcheurs. De petits murets décoratifs bordent parfois le chemin, témoignant de l’effort humain pour domestiquer et embellir ce paysage sauvage.

Bessey, le plus grand village sur le parcours, se dévoile enfin. Au cœur du village trône une église entourée de belles maisons de pierre. C’est ici que l’on trouve le seul point d’eau sur le trajet, une oasis précieuse pour les voyageurs fatigués. Le centre du village offre des possibilités de restauration, une rareté dans cette région où les autres villages ne disposent pas de tels services.

Les pierres éclatantes, de toutes les couleurs, respirent et vibrent partout dans le village. Ce mélange subtil de granit, de gneiss, de grès et de marne confère au village un charme unique et pittoresque, un mariage harmonieux de textures et de teintes qui raconte l’histoire géologique et humaine de la région.

Section 5 : Dans les sous-bois et les vergers

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans problème, si ce n’est une petite bosse près du hameau de Le Buisson.

Depuis Bessey, le chemin serpente à travers les vergers, où des vignes éparses s’étirent sous l’ombre légère des bouquets de frênes. Dans toute la région, le sol est dur, compact, souvent jonché de petits cailloux acérés qui rendent la marche malaisée, sans pour autant constituer un obstacle insurmontable. Les randonneurs apprennent vite à apprivoiser ce terrain capricieux, trouvant dans chaque pas une connexion intime avec la terre elle-même. 

Dans cette contrée, les cultures se font rares, seules quelques parcelles de maïs osent défier la prédominance des vergers. On n’y trouve point de blé, mais plutôt une profusion de pommiers, dont les fruits promettent de douces récoltes. Les pêchers et abricotiers se font rares, mais leurs présences sporadiques ajoutent une note de diversité. Les vergers, jalousement protégés par de grandes tentures, semblent ainsi conserver un secret précieux, offrant une scène d’une beauté discrète mais authentique.

D’un verger à l’autre, d’une prairie à l’autre, le GR65 mène bientôt à une petite route au hameau du Mas de Goëly. Là, une croix de grès, plantée sur un socle granitique, s’élève majestueusement, symbole de foi et de tradition.

Si le Mas de Goëly s’est modernisé avec des lotissements récents, le village de Goëly voisin conserve son charme d’antan. Ses maisons de pierre, dont l’âge se perd dans la mémoire des pierres, murmurent des histoires anciennes à qui veut bien les entendre. Une croix plus modeste orne aussi la rue, et comme les pèlerins sont peu nombreux sur la Via Gebennensis, les petits cailloux votifs n’ont que rarement l’occasion de s’accumuler sur les piédestaux des croix du chemin.  

À Goëly, subsiste un ancien lavoir, témoin muet d’une époque révolue où les eaux limpides bruissaient encore des activités quotidiennes. Aujourd’hui, l’eau y est tarie depuis longtemps, laissant place à une mare stagnante, royaume des crapauds. Les grenouilles, autrefois si nombreuses, se font de plus en plus rares, leur chant mélancolique s’évanouissant peu à peu dans la mémoire des lieux.

À la sortie du village, le GR65 retrouve la terre battue et les vergers, comme une tendre invitation à renouer avec la nature après les passages pavés.

Peu après, il traverse une petite route vicinale et commence à grimper en direction d’un camping, suivant un sentier goudronné qui s’élève doucement.

Puis la terre battue revient, fidèle compagne du chemin. La montée débute dans les vergers, offrant une palette de verts et de fruits qui embaument l’air de parfums délicats. Au niveau du camping, qui apparaît presque sauvage et indompté, la pente se fait plus rude dans le sous-bois de feuillus. Ce lieu, solitaire et paisible, semble peu fréquenté en dehors des mois d’été, gardant une atmosphère de sérénité immuable.  

À la sortie de ce sous-bois discret, la pente s’adoucit, et le GR65 rejoint une petite route qui conduit au hameau nommé Le Buisson.

Ici encore, de belles maisons de pierre s’érigent avec grâce, témoignant d’un savoir-faire ancestral. Une croix de grès, modeste mais empreinte de signification, souligne la religiosité de l’endroit. Dans toute la région, le matériau de base des constructions est le moellon de calcaire ou de grès clair, conférant aux habitations une harmonie naturelle avec leur environnement.

Depuis le Buisson, la route descend gracieusement à travers les vergers et les prés, offrant des vues apaisantes de la campagne environnante.

Elle mène rapidement au lieudit Chez Paret, où elle serpente paresseusement le long des murets, souvent à l’ombre des frênes. Ces arbres, véritables rois des bords de route ici, ont été épargnés par le champignon ravageur de la chalarose qui décime leurs congénères dans tant d’autres régions d’Europe.

Le GR65 quitte Chez Paret par la route, pour ensuite retrouver un chemin envahi par les hautes herbes. Là, une majestueuse croix de fer se dresse avec foi et élégance, semblant veiller sur les voyageurs.

Puis, le parcours reprend sa course sur une étroite sente serpentant à travers un sous-bois épars et des herbes folles, avant de retrouver un large chemin bordé de pommiers, invitant à la sérénité.

Section 6 : D’un petit hameau à l’autre entre sous-bois et campagne

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans difficulté.

Un sentier, souvent semé de pierres rugueuses, serpente à travers le sous-bois de feuillus. Au milieu de ce foisonnement, les frênes, chênes et érables s’élèvent majestueusement, tandis que les châtaigniers, jadis plus discrets, retrouvent de la vigueur. Cependant, cette renaissance est éphémère, car plus l’on grimpe, plus ces châtaigniers semblent se dissiper comme des spectres au lever du jour.  

Après avoir franchi le minuscule ruisseau du Fayen, qui se perd dans les herbes folles et la végétation luxuriante, le chemin émerge du bois pour s’étendre sur un champ de gros galets. Une curiosité géologique fascinante se dévoile ici : c’est comme si les moraines de la Bièvre avaient migré jusqu’à cet endroit. Sans doute l’ont-elles fait, mais elles se sont largement disséminées avec le temps, créant un paysage unique et captivant.

Le chemin traverse alors des prés ondoyants. Devant vous, le gros village de Saint-Apollinard et son église se dessinent à l’horizon. En contrebas, une usine se dresse, appartenant à la marque Justin Bridou, érigée en 1981. Cet établissement de conditionnement de la charcuterie, propriété du Groupe Aoste, le leader de la charcuterie française, fait partie de la grande multinationale Campofrio Food Group, un conglomérat hispano-mexicain. Il est surprenant de constater que les souverains de la charcuterie française ne sont plus français. Les viandes proviennent principalement de Chine et des États-Unis. Cette multinationale est présente aux quatre coins du globe. Il est aussi curieux de voir cet établissement perché ici, sur les hauteurs, loin des autoroutes de la plaine.

Peu après, le chemin continue sa douce descente, se dirigeant vers le discret hameau de Bazin.

Puis, le chemin repart dans le sous-bois, longeant des murets de pierre, serpentant au milieu des érables, des chênes, des frênes, et des bouquets de châtaigniers sauvages. Ici, la nature semble avoir été laissée à son propre rythme, préservée dans sa splendeur originelle, évoluant sans trop d’intervention humaine.

Dans cet écrin de verdure, la nature sauvage éclate de toute sa vigueur. Ce paysage, oscillant entre la rigueur minérale et la douceur des arbres, présente un contraste saisissant, accentué par les murets de pierre que les paysans ont peut-être érigés pour des raisons esthétiques. Les petits chênes pullulent le long des terres pauvres, couvertes de gros cailloux. Plus loin, il semble que le chemin ait été débarrassé de ses pierres les plus encombrantes. Ici, ce ne sont plus les galets ronds de l’Isère, mais arfois des calcaires anguleux, ajoutant une touche authentique à ce décor sauvage.

Ensuite, le GR65 s’écarte légèrement, traversant une allée de noyers, pour découvrir un lavoir qui semble se languir paisiblement à l’entrée du village de Pourzin.

Une route goudronnée serpente à travers un lieu extraordinaire qui ferait pâlir d’envie tous les autres villages de la région, avec ses magnifiques maisons de pierre bâties pour résister à l’épreuve du temps. Cependant, il est malheureux de constater que ces villages semblent être avant tout des musées à ciel ouvert, rarement fréquentés par leurs habitants, et apparemment dépourvus de véritables centres de vie sociale. Malgré tout, il est évident que quelques âmes persistent dans ces lieux, comme en témoignent les rares véhicules stationnés ici et là.

Derrière les imposants murs de pierre du village, le GR65 reprend son chemin sur le bitume.  

La route continue ensuite en direction du bourg de Saint-Apollinard, dont on devine l’église derrière les vergers, bien que le GR65 ne s’y dirige pas. 

Elle conduit ensuite au hameau du Curtil, où le GR65 quitte l’axe routier pour s’enfoncer de nouveau dans un chemin serpentant à travers un sous-bois, parmi les feuillus.

Le passage sous les frondaisons est fugace, et vous retrouvez le bitume à l’entrée du village de Mérigneux, avec ses nobles demeures en pierre brute qui brillent sous le soleil.

En sortant du village, une route dévale doucement à travers la campagne avant de s’élever en direction de la montagne, avec des pentes atteignant parfois plus de 10%, mais ce n’est ici qu’un avant-goût pour ouvrir l’appétit.

Un peu plus haut, le GR65 s’écarte de la route pour prendre un raccourci grimpant sous les noyers et les frênes.   

Les pèlerins, bien préparés pour leurs étapes, savent que les moments de répit se terminent et qu’ils font face à une section plus ardue. Ici, sur près d’un kilomètre, le chemin va imposer parfois des pentes dépassant les 25%. Pourtant, au début, il serpente un peu avec une sévérité contenue sur l’herbe jusqu’à rejoindre la petite route. 

Le passage sur la route est court, près du lieu-dit Les Rôtisses, où la route se termine pour vous en impasse. Ici, les premiers conifères apparaissent au milieu des feuillus, annonçant un changement dans la végétation. La transition est marquée par des pins et des épicéas qui se dressent fièrement, contrastant avec les châtaigniers, les érables, et surtout les chênes qui prennent presque toujours le pouvoir sur les pentes arides.

Un chemin s’élève alors d’abord sur l’herbe dans la forêt. La pente, bien que déjà sévère, reste encore assez raisonnable, permettant aux randonneurs de progresser avec une certaine aisance. La nature environnante est luxuriante à souhait.

Puis, la pente s’accentue sérieusement. Le passage devient pénible, non seulement à cause de la pente, mais aussi à cause de l’état du chemin où affleurent de gros cailloux. Vos souliers dérapent souvent sur les pierres roulantes. Les feuillus dominent encore nettement le paysage dans le sous-bois sombre, et les chênes trapus vous offrent une ombre bienfaisante. La canopée dense filtre avec difficulté les rayons du soleil, créant un jeu subtil de lumières et d’ombres sur le sol, ajoutant à la beauté mystérieuse du lieu.

Section 7 : Tout là-haut, à la Croix de Blandine et à la Combe Noire, avant de plonger dans la vallée

Aperçu général des difficultés du parcours : la plus grande difficulté du parcours, c’est la montée à la Croix de Ste Blandine présentant parfois des pentes dépassant 20% ; la descente sur St Julien n’est pas facile, non plus.

Le chemin s’élève ardemment, s’immisçant dans une clairière où les pins se font plus majestueux, tels des gardiens immuables de ce sanctuaire naturel. Devant vous s’étend un champ de galets, une mosaïque scintillante sur une pente vertigineuse. Une stèle solitaire annonce que Santiago est encore à 1’600 kilomètres. Loin d’être décourageant, ce rappel de la distance à parcourir invite à la méditation, surtout lorsque chaque goutte de sueur semble raconter une histoire de persévérance et de dévouement. 

Au sommet de cette ascension ardue, la pente ne faiblit guère, mais les cailloux se font moins nombreux à mesure que le chemin serpente vers une croix modeste, plantée avec humilité dans le talus. Cette croix marque l’entrée du gîte de Sainte Blandine, un refuge paisible pour les pèlerins épuisés.

Ici, de nombreux marcheurs ressentent une véritable délivrance après la rigueur de la montée, et nombreux sont ceux qui choisissent de s’abandonner à la quiétude de ce lieu montagnard enchanteur plutôt que de poursuivre vers Saint-Julien-Molin-Molette.

Le chemin continue ensuite de flâner à travers des prés verdoyants, flirtant avec les lisières des bois, jusqu’à la Croix de Sainte Blandine. Érigée en 1895 et bénie lors d’une mission, cette croix protectrice, haute de 4 mètres, veille sur la plaine en contrebas. Elle domine la vallée du Rhône, comme un poème architectural. 

Les pèlerins, s’ils trouvent le courage de grimper le talus jusqu’à la croix, sont récompensés par une dernière vue imprenable sur la vallée du Rhône. Les vergers, ornés de tentures, s’étendent comme des tapisseries vivantes, enrichissant le voyage de leurs éclats de couleurs et de parfums. Ce belvédère naturel, par temps clair, offre un spectacle où les montagnes ardéchoises, le Rhône et les Alpes se fondent en une seule et magnifique toile.

Depuis la Croix de Ste Blandine, le large chemin serpente tranquillement sur le plateau, traversant des pâturages verdoyants où paissent parfois des troupeaux de bétail. Il descend légèrement vers la forêt, au-dessus de laquelle se dessinent les rares toits du hameau de Combe Noire.

Vous ne marchez pas à une altitude très élevée, à environ 700 mètres, une hauteur encore favorable aux feuillus au détriment des conifères. Progressivement, le chemin reprend son ascension vers le sommet de la colline, avec une pente très sévère vers le sommet de la colline. La forêt se densifie, l’obscurité et la fraîcheur des sous-bois ajoutant une touche de mystère à l’ascension.

Bientôt, le chemin atteint le hameau de Combe Noire, perché au sommet de la colline, avec ses solides maisons de pierre qui témoignent de la robustesse et de la résilience de ses rares habitants, s’il y en a encore. 

À ce point, l’itinéraire du GR65 est sans ambiguïté. En contrebas, le village de Chatagnard se dévoile à travers la végétation luxuriante. La descente est pénible, souvent caillouteuse, et le sous-bois offre un chemin escarpé avec une inclinaison de plus de 15% sur près d’un kilomètre. Les pèlerins qui respectent scrupuleusement les traditions et les lois du chemin, persuadés de suivre les traces de leurs ancêtres, emprunteront ce sentier éprouvant.

Certes, il existe une alternative bien plus reposante pour les âmes en quête de tranquillité : la route. Celle-ci, bien que descendant également, offre une pente douce et modérée, glissant à l’ombre bienveillante des arbres feuillus. Point de cailloux pour entraver le passage, juste une promenade agréable, presque méditative, sous la canopée verdoyante. C’est cette voie que nous avons choisie, préférant la sérénité de cette descente paisible. 

Quel que soit votre choix, que ce soit l’ardeur du sentier ou la quiétude de la route, vous finirez par atteindre la charmante croix du hameau de Chatagnard. Ce lieu enchanteur, évoqué par son nom même, est une promesse de châtaigniers qui parsèment le parcours, leurs branches s’entrelacent comme pour former un arc naturel au-dessus de votre tête.

La route continue de s’incliner légèrement sous le hameau, serpentant au milieu des sombres épicéas, soigneusement plantés pour rappeler que ce n’est pas seulement le royaume des châtaigniers sauvages, mais un paysage diversifié où chaque arbre raconte une histoire différente. Vous passerez également près d’une autre croix, modeste, témoignant de la spiritualité qui imprègne cette terre.

Mais les organisateurs de ce parcours, esprits facétieux, ont préféré vous réserver une surprise. Plutôt que de vous laisser descendre tranquillement vers Saint-Julien-Molin-Molette, ils ont tracé un chemin de traverse, surnommé malicieusement le Chemin de Compostelle, pour ajouter une touche d’authenticité. Ce chemin, loin d’être un simple cheminement, vous fait gravir une autre colline, cette fois sous l’ombrage des pins majestueux, ajoutant un défi supplémentaire à votre périple.

En grimpant plus haut, le chemin se mue en une route qui s’élève encore, traversant de vastes prés où l’herbe danse au gré du vent. Cette ascension vous mène jusqu’à un lotissement de villas récentes, modernité contrastant avec la nature environnante. De ce point, vous vous trouvez surplombant Saint-Julien-Molin-Molette, avec une vue imprenable sur le bourg niché en contrebas.

Pour le plaisir de vos genoux et articulations, mais aussi comme une récompense bien méritée après tant d’efforts, la dernière étape de ce voyage se conclut par une descente abrupte, plus de 15%, sur une route qui serpente vers le cœur du bourg. C’est une plongée vertigineuse, où chaque pas vous rapproche de la fin de cette aventure, laissant dans votre sillage la beauté des collines et la quiétude des paysages traversés.

Le bourg compte 1’250 habitants, bâti dans une cuvette où passe la rivière du Ternay. Le village a une longue histoire. Son nom évoque bien les moulins et les molettes, qui sont des pierres à aiguiser. Les gaulois, puis les romains sont passés par ici. Les romains exploitaient ici les mines de plomb, riches dans la région. Puis le temps passa et au début du XVIIe siècle, des industries vinrent s’implanter à Saint-Julien, en relation d’une part avec l’exploitation des mines de plomb, d’argent et de cuivre, d’autre part avec le moulinage des soies. A cette période, le village était peuplé de nombreux travailleurs étrangers. C’est incontestablement l’industrie des soies qui fut le fleuron du bourg. Ils ont utilisé l’eau du Ternay pour la filature, le moulinage, le tissage des foulards, l’impression des tissus. Tout cela a disparu depuis fort longtemps, la dernière usine ayant fermé dans les années 1970. Mais il reste dans le village des traces de l’industrie de jadis.

Sur la place de l’église où sont érigées de belles fontaines modernes, se dresse l’église. Cette église du XVIe siècle a été construite en l’honneur de l’honneur de saint Julien de Brioude. L’église est sobre, lumineuse. Son ancienne chaire du XVIIe siècle est classée monument historique. Il y a aussi dans le bourg un célèbre calvaire, où nous passerons demain.

Logements

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